De l’aveu même de Catherine Dorion, l’ex-élue de Québec solidaire n’avait « pas une envie décapante de devenir députée ». Elle jugeait même qu’une victoire dans Taschereau serait « un peu triste ». Ce mépris de la fonction et de ses responsabilités démocratiques, Catherine Dorion n’y a jamais renoncé.
Dans son livre Les têtes brûlées, elle s’évertue à dénigrer l’Assemblée nationale et le travail qui s’y abat. Un « exercice parlementaire vain » qui cantonne l’opposition à l’« impuissance ». Des activités quotidiennes marquées par la « vacuité », orchestrées autour d’une période des questions « de mauvaise foi ».. La démocratie parlementaire n’est rien de plus qu’un grand théâtre inutile à ses yeux.
Que Catherine Dorion garde d’aussi mauvais souvenirs de son passage en politique est navrant. Mais sa calomnie du rôle de député n’est pas pour autant justifiée.
Certains de ses constats sont légitimes. Il est vrai qu’un gouvernement majoritaire ignore trop souvent les contributions de l’opposition. Il arrive néanmoins qu’elles soient retenues — elles sont loin d’être aussi futiles, donc, qu’elle le prétend.
Il est vrai aussi que la politique partisane et le parlementarisme imposent un carcan qui peut être contraignant. Plutôt que de s’entêter à refuser d’y participer, Catherine Dorion aurait pu mettre à profit son unicité pour les réformer.
Il est vrai, enfin, que les médias ont accordé une importance démesurée à ses cotons ouatés. Or, l’élue solidaire aurait pu profiter de cette notoriété pour impulser le mouvement social qu’elle se targue d’avoir voulu lancer.
D’autres personnalités rebelles ou non conformistes ont fait leur entrée avant elle au Salon bleu et aux Communes, et elles ont choisi d’y faire progresser les débats politiques et de société. Dans les rangs solidaires, Amir Khadir a déposé six projets de loi dès son premier mandat ; Manon Massé, huit (dont un a été adopté). En déposant le même texte législatif trois fois, le néodémocrate Roméo Saganash a convaincu Justin Trudeau de l’ériger en loi.
En quatre ans, Catherine Dorion n’en a pas présenté un seul. Sa quête de l’irrévérence à tout prix s’est surtout traduite par une inertie. Qu’elle ait abdiqué ses pouvoirs de députée par pure contestation ne reflète en rien la réelle portée de la fonction.
Prétendre le contraire est sinistre alors que, aux quatre coins du monde, la démocratie est remise en question.