Gamera : Régénération Saison 1

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The Showa must go on

La franchise Gamera a cela d’intéressant qu’elle a couvert, en plus de 50 ans d’existence, toutes les approches tonales du genre du Kaiju eiga (les gros monstres qui se foutent sur la tronche). Conçue comme une réponse à Godzilla, la tortue géante est vite devenue une mascotte chérie des enfants. Toutefois, au cours des années 1990, Shusuke Kaneko en a fait un terrifiant mastodonte dans une trilogie plongeant progressivement dans le grand spectacle morbide, voire dans l’horreur pure.

À l’instar du dernier long-métrage en date, Gamera – L’héroïque, la série diffusée sur Netflix s’inspire de l’ère Showa, âge d’or du genre où la grosse bestiole s’alliait avec la marmaille japonaise pour poutrer des ennemis en caoutchouc. D’ailleurs, à l’époque, Godzilla faisait exactement la même chose. Les héros sont donc des enfants, persuadés – à raison ! – que Gamera est venu les défendre de la faune colossale se déchainant sur eux. Ensemble, ils accompagnent leur idole, forcément plus malins que la cohorte d’adultes scientifiques et militaires contemplant impuissants les bastons de Kaijus.

 

Gamera : Régénération : photoGamera, mera, hé hé

 

Le matériel promotionnel avait promis un beau roster. Il n’avait pas menti. Gamera affronte les uns après les autres une bonne partie des monstres de la première saga. Certains n’ont pas perdu de leur superbe, comme Guiron et sa lame frontale dont la taille a encore été revue à la hausse, l’éternel Guyos, Zigra et surtout Viras, étrange poulpe transformé en entité tentaculaire presque lovecraftienne (toutes proportions gardées).

Des pugilats rigolos entrecoupés des pérégrinations de nos courageux marmots et d’une mystérieuse organisation humaine, une intrigue simple, une dose de manichéisme et de mandales disproportionnées… Toutes les conditions étaient réunies pour un gros shoot de nostalgie. À condition évidemment de lui pardonner sa naïveté, Régénération fait preuve d’une douce candeur rappelant effectivement l’ère Showa du Tokusatsu. Et elle aurait même pu séduire les gosses d’aujourd’hui qui n’ont pas eu la chance de grandir avec la plus cool des tortues (va te rhabiller Franklin, mieux vaut cracher des boules de feu que compter deux par deux).

 

Gamera : Régénération : photoAh oui, il est là aussi, lui

 

Laids monstres

Du moins, ça aurait été le cas si la série ne constituait pas un grave danger pour leurs jeunes mirettes. En l’état, il est difficile d’apprécier sa légèreté, tant elle est laide. Déjà en 2017, la trilogie Netflix Godzilla maltraitait les amoureux du roi des monstres, ainsi que son concept ambitieux, avec un cell-shading d’un goût pour le moins discutable. C’est bien son coréalisateur Hiroyuki Seshita qui s’occupe de la mise en scène de Gamera : Régénération, laquelle assume encore plus le tout-CGI (images générées par ordinateur).

Probablement influencé par la relativement sympathique Godzilla Singular Point, toujours sur Netflix et faisant également usage d’effets numériques pour ressusciter les bestioles de l’ère Showa, le studio ENGI passe à la moulinette CGI personnages monstrueux et humains, avec un résultat au mieux regardable les yeux plissés. Les Kaijus s’en sortent à peu près pour la plupart, sauvés par leurs designs. Les humains, en revanche, sont de fades mannequins numériques tout crispés, aux expressions gênantes et à l’animation plus qu’approximative. Manque de bol, c’est encore avec eux qu’on passe le plus de temps.

 

Gamera : Régénération : photo“Regarde l’animation de cette tortue !” 

 

Il va de soi que le brave Gamera, éternel second couteau, véritable Poulidor à carapace, n’a probablement pas bénéficié du même budget que certaines grosses productions diffusées récemment. Mais dans ce cas, pourquoi proposer des épisodes au format 45 minutes, alors que 25 auraient suffi à concentrer l’essentiel, à savoir des monstres, de la bagarre et des bons sentiments ?

De toute évidence, la plateforme encourage fortement cette esthétique en animation, puisque l’obsession pour les modèles 3D dégueulasses dépasse même le petit monde du Tokusatsu japonais : Jurassic World : La Colo du Crétacé, dérivé d’une franchise hollywoodienne multimilliardaire, nous avait elle aussi fait pleurer du sang. Gamera : Régénération parvient à faire pire encore. Un bien triste exploit. Reste à espérer qu’un potentiel succès convainque des producteurs d’allouer aux amoureux de la tortue préhistorique les moyens qu’elle mérite. Même si les dernières minutes font plutôt craindre une saison 2.

Gamera : Régénération est disponible intégralement sur Netflix depuis le 7 septembre 2023.

 

Gamera : Régénération : Affiche officielle

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