La Caisse de dépôt et placement du Québec n’a ni diffamé ni abusivement congédié Alfonso Graceffa, un de ses ex-dirigeants, selon un jugement que vient de rendre la Cour supérieure du Québec. M. Graceffa poursuivait son ex-employeur à hauteur de 8,4 millions de dollars pour ces motifs. La Caisse de dépôt devra toutefois lui payer les 768 000 $ en primes qui ne lui avaient pas été versés.
La Caisse de dépôt a finalement eu gain de cause face à Alfonso Graceffa, qui a été « congédié sans préavis » de la haute direction des filiales Ivanhoé Cambridge et Otéra Capital, en mai 2019.
À la suite d’une série de reportages publiés par Le Journal de Montréal à partir de février 2019 qui rapportent plusieurs manquements éthiques de la part d’employés de la Caisse, celle-ci avait déclenché une enquête, qui a finalement conduit au renvoi de trois personnes, dont M. Graceffa.
Dans son jugement du 15 novembre, le juge de la Cour supérieure Andres Garin note que l’ex-dirigeant « a gravement manqué à ses obligations à titre d’employé et de cadre supérieur en acceptant 15 000 $ en espèces, dans son bureau chez Otéra, d’un individu ayant un casier judiciaire pour trafic de stupéfiants ».
Il qualifie cette « faute » d’« intolérable compte tenu de l’importance cruciale de la confiance du public » dans la probité et la fiabilité de la Caisse, qui gère « les fonds utilisés pour les pensions de millions de Québécois ».
Par ailleurs, M. Graceffa « n’avait pas divulgué ses rôles au sein de trois sociétés externes », et « il n’avait pas divulgué pleinement l’étendue de sa relation d’affaires avec un tiers qui était à la fois un client et un fournisseur de services d’Otéra », peut-on lire.
« À eux seuls, ces manquements aux codes de déontologie ne justifient pas la sanction ultime du congédiement sans préavis », mais ils « aggravent la rupture de la relation de confiance nécessaire au maintien de l’emploi de M. Graceffa en tant que cadre supérieur », note le juge Garin.
Par ailleurs, même si « les déclarations publiques » de la Caisse « ont fait perdre de l’estime » à l’ancien cadre, l’institution n’a « pas commis de faute civile en faisant ces déclarations » et ne l’a « pas diffamé », indique le jugement.
Malgré ça, la Caisse devra tout de même lui payer 768 000 $ en primes. Sa filiale Ivanhoé Cambridge « ne pouvait pas retenir unilatéralement une portion de la rémunération contractuelle de Graceffa qui lui était due en avril 2019 alors qu’il était en congé volontaire payé », stipule le document de la Cour.
Alfonso Graceffa n’a pas encore décidé s’il portera ou non la décision en appel, a fait savoir son relationniste au Devoir. « Il a pris connaissance du jugement et est en réflexion pour la suite », écrit-il.