Autonomie prolongée, recharge instantanée, durée de vie infinie et une fabrication respectueuse des normes environnementales et sociales. Est-ce seulement possible ? Chose sûre, il semble qu’il faudra plus d’une recette pour produire les batteries des véhicules électriques de demain.
À McMasterville, le fabricant suédois Northvolt prévoit fabriquer des batteries similaires à celles qui sortent déjà de son usine Northvolt Ett (« Northvolt Un ») de Skellefteå, en Suède. Il s’agit de batteries au lithium dont la cathode est composée de nickel, de manganèse et de cobalt. La recette exacte de Northvolt est appelée Lingonberry NMC. Le mot« lingonberry » se traduit en français par airelle rouge. Cette petite baie peut être transformée en une gelée qui, dit-on, accompagne à merveille les légendaires boulettes de viande suédoises.
Déjà, Northvolt se targue de produire les batteries « les plus responsables », surtout grâce au fait que ses usines sont alimentées par de l’énergie renouvelable. D’ici 2030, l’entreprise promet d’incorporer dans ses batteries 50 % de matériaux recyclés, extraits de batteries en fin de vie.
NMC et LFP
Ces jours-ci, dans l’industrie automobile, on oppose aux batteries NMC une technologie similaire appelée LFP qui est plus résistante, mais moins performante. Elle est composée de lithium, de fer et de phosphate. Les batteries LFP sont moins denses, ce qui signifie qu’à poids égal, elles produisent moins d’énergie. Mais elles résistent mieux à la chaleur.
Les constructeurs de véhicules électriques semblent de plus en plus se brancher sur cette formule : pour des véhicules plus performants, les batteries NMC sont plus appropriées, alors que pour des véhicules plus durables ou plus abordables, ils se tournent vers des batteries LFP.
Mais pas tout le temps. Par exemple, LG Chem, la filiale du géant coréen LG qui est un des plus importants fournisseurs de batteries des constructeurs d’automobiles, fabrique des batteries NMC auxquelles il ajoute de l’aluminium, ce qui rend leur assemblage plus abordable. De leur côté, Northvolt et le constructeur de poids lourds suédois Scania ont dévoilé plus tôt cette année une batterie au nickel manganèse cobalt particulièrement durable, qui serait capable de faire rouler des camions pendant au moins 1,5 million de kilomètres.
En fait, on ne sait pas encore jusqu’où on peut améliorer la technologie NMC. Jeff Dahn, un pionnier de la technologie lithium-ion affilié à l’Université de Dalhousie, à Halifax, en a fait la preuve le printemps dernier. Devant d’autres chercheurs, il a présenté un prototype de batterie appelée NMC 532 qu’il testait depuis 2017 en la chargeant et la déchargeant à répétition. Sous le capot d’une voiture électrique, sa batterie aurait permis de parcourir au-delà de six millions de kilomètres, en ne perdant sur cette période que 5 % de sa performance initiale.
Lithium métallique
Cuberg, une société américaine rachetée par Northvolt en 2021, espère commercialiser un jour des batteries pour des avions électriques. Elle mise sur une chimie différente, laconiquement appelée « lithium métal ». Une batterie au lithium métal remplace par du lithium sous forme solide l’anode d’une batterie au lithium ion, qui est généralement composée de graphite.
La technologie lithium métal est prometteuse, mais vient avec son lot de risques, comme une recharge très complexe. Cuberg dit avoir éliminé ces risques et assure que ses batteries sont, à densité égale, entre 40 et 70 % plus performantes qu’une batterie au lithium traditionnelle. L’entreprise espère vendre ses premières batteries lithium métal au secteur de l’aviation dès 2025. Son rachat par Northvolt lui permet aussi de s’ouvrir au secteur automobile, puisque, assure-t-on chez Cuberg, le procédé de fabrication de ses batteries est très similaire à celui d’une batterie NMC comme celles produites par sa société mère suédoise.
Du solide
Malgré tout cela, la vraie révolution dans le transport électrique pourrait se trouver du côté des batteries à électrolyte solide, aussi appelées batteries tout solide. La plupart des grands constructeurs automobiles prévoient migrer vers cette technologie entre 2027 et 2030. Dans ce secteur, les batteries tout solide y sont le Saint-Graal : peu coûteuses à produire, elles seraient aussi plus compactes, plus légères et plus durables que les batteries actuelles.
Par exemple, Toyota a affirmé cet été avoir effectué une « percée majeure » de ce côté lui permettant, si tout se passe comme prévu, de vendre des véhicules électriques abordables et capables de parcourir 1200 kilomètres après dix minutes de recharge seulement. Il reste seulement au constructeur de trouver comment assembler ses futures batteries à un rythme comparable à celui d’une usine de batteries traditionnelle. « On y est presque », a assuré Toyota.
BMW, Ford et Nissan seraient eux aussi à l’aube de produire des véhicules électriques animés par de telles batteries. Nissan promet une première voiture sur la route en 2028 et, la même année, des batteries « jusqu’à 65 % moins coûteuses » que les batteries actuelles.
Évidemment, il faudra le voir pour le croire, mais le constructeur pense qu’il sera possible avant la fin de la décennie de faire le plein d’électrons comme on fait présentement le plein d’essence, pour une autonomie comparable. Si ça se produit, on aura alors enfin trouvé la batterie parfaite pour le transport électrique.