les 5 meilleurs films complètement fous (ou très bizarres) inspirés par le monstre

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Pauvres créatures, le nouveau film de Yorgos Lanthimos avec Emma Stone en tête d’affiche, fait son petit effet en salles. L’occasion de revenir sur d’autres réécritures folles du mythe de Frankenstein.

On ne présente plus Frankenstein où le Prométhée moderne, roman gothique et de science-fiction majeur, écrit par Mary Shelley et publié en 1818. De cette histoire de savant orgueilleux donnant vie à une (pauvre) créature, faite de morceaux de cadavres, auront découlé des centaines et des centaines d’adaptations. Des livres, des films, des séries, des peintures… Si tout le monde a en tête le visage grimé de Boris Karloff, dont l’interprétation du monstre chez James Whale est devenue une référence, il existe des versions bien différentes du personnage et du mythe, créées dans des esprits tous plus fous les uns que les autres. Retour sur quelques-unes de ces réécritures cinématographiques.

 

Frankenweenie

  • Sortie : 1984 (puis 2012)
  • Durée : 29 minutes (puis 1h27)

 

Frankenweenie : photoLa fiancée de Frankenweenie

 

Avant le long-métrage de stop-motion du même nom, Tim Burton avait déjà donné vie à Frankenweenie en 1984 sous la forme d’un court-métrage en prise de vue réelle et en noir et blanc. Dans cette œuvre de jeunesse particulièrement belle et touchante (dans laquelle on peut apercevoir Shelley Duvall), Burton raconte l’histoire de Victor Frankenstein (au cas où ce n’était pas clair), un petit garçon qui entreprend de ressusciter son chien renversé par une voiture. À la manière du savant de Mary Shelley, le petit Victor convoque le pouvoir des sutures et des éclairs pour ramener son toutou d’entre les morts.

Si ce superbe petit film est la première adaptation de Burton entièrement consacrée au mythe, l’histoire de Frankenstein traverse la filmographie du réalisateur de part en part : le court-métrage Vincent réalisé en 1982, Edward aux Mains d’Argent en 1990, L’Etrange Noël de monsieur Jack (réalisé par Henry Selick) en 1993… jusqu’à la version longue et animée de Frankenweenie sortie en 2012, tous ces films comportent autant d’hommages à Mary Shelley. L’influence de l’autrice sur l’œuvre de Burton se ressent d’ailleurs jusque dans le costume de Catwoman dans Batman : Le Défi, et il y a fort à parier que la créature ressurgira de nouveau dans les films de Burton, que ce soit sous la forme d’un chien ou non.

 

Une Créature de Rêve

  • Sortie : 1985
  • Durée : 1h34

 

Une créature de rêve : photoLe crush de Frankenstein

 

Quand le roi du teen-movie John Hughes s’attaque à Frankenstein, le résultat est forcément… atypique. En fait, Une créature de rêve tire surtout son inspiration de la célèbre revue pulp Weird Science publiée par EC Comics, à laquelle il emprunte son titre original, et plus particulièrement au récit Made of the Future de Al Feldstein. Mais évidemment, bande dessinée et film sont des héritiers assumés du roman de Mary Shelley et des archétypes qu’elle a instaurés. C’est d’ailleurs en visionnant le long-métrage de 1931 que le héros a l’idée de faire son propre monstre… à l’aide de son ordinateur.

Le reste de l’intrigue dévie volontairement de cette référence, se concentrant plus sur les ados que sur leur création, qui va bien évidemment les aider à grandir. Un postulat qui serait un peu douteux si le cinéaste n’embrassait pas complètement l’immaturité de ses protagonistes. Weird Science se complait dans le surréalisme kitsch au point de ressembler à une délicieuse hallucination... représentant bien l’euphorie libidineuse de l’adolescence. Le plus grotesque des teen-movies des années 1980 est en fait très attachant et son hommage à Frankenstein très original. Point bonus : l’apparition délicieuse d’un jeune Bill Paxton en grand frère décérébré.

 

Frankenhooker

  • Sortie : 1990
  • Durée : 1h20

 

Frankenhooker : photoChiant quand ça arrive

 

« Quand on a montré Frankenhooker à la MPAA, le chef du comité de l’époque a appelé notre compagnie et le gars a dit à la secrétaire : “Félicitations, vous êtes le premier film classé S.” Et elle a dit : “S pour Sex ?” And il  a dit : “Non, S pour Shit” » se remémorait l’éminent Frank Henenlotter dans les colones de The Skinny. Le réalisateur des cultes Basket Case, largement méprisé par l’institution, est pourtant l’un des plus attachants artisans du genre. Et sa version de Frankenstein, où un scientifique éploré reconstitue sa copine morte d’un accident de tondeuse avec les morceaux de prostituées new-yorkaises les plus à son goût, reste probablement l’un de ses meilleurs films.

Il s’agit bien entendu d’une comédie bis des plus abracadabrantesques, qui profite de son pitch grivois pour apporter la dose réglementaire de nudité féminine. Mais non seulement le sens du rythme, du gore et du mauvais goût du cinéaste fonctionnent ici à plein régime, mais il en ressort aussi, consciemment ou non, une raillerie adressée au cinéma d’exploitation. Pastiche débridé, Frankenhooker met en scène un pervers qui se vide lui-même la cervelle à coups de lobotomies et assemble des morceaux de femmes comme on construit un set de Lego. C’est ce qui s’appelle être lucide.

 

The Rocky Horror Picture Show

  • Sortie : 1975
  • Durée : 1h36

 

The Rocky Horror Picture Show : photoEn direct de l’Eurovision

 

The Rocky Horror Picture Show fait partie de ces films qui ont profondément imprégné la pop culture. Même les personnes ne l’ayant pas vu connaissent son affiche noire ornée d’une bouche rouge qui se mord la lèvre, et sont familières avec le look et le maquillage drag arborés par Tim Curry dans le rôle du docteur Frank-N-Furter. Film musical réalisé par Jim Sharman et sorti au cinéma en 1975, cet OVNI de cinéma de genre qui revisite le mythe de Frankenstein à la sauce queer et sexuelle continue de déchaîner les passions encore aujourd’hui.

Aux côtés de Tim Curry, Susan Sarandon interprète la très respectable Janet, fiancée à Brad, qui va faire la rencontre de l’intrigant docteur Franken-N-Furter et découvrir la liberté d’un plaisir subversif à ses côtés. Énorme succès en salles pour un budget ridicule, le Rocky Horror est devenu un véritable objet de culte, une religion à part entière, qui a su remettre sur le devant de la scène certains des sous-textes queers présents dans beaucoup de romans gothiques et fantastiques. Adaptée en comédie musicale, cette œuvre s’apprécie encore aujourd’hui à toutes les sauces, et peu de versions de l’histoire de Mary Shelley peuvent se targuer d’avoir eu un tel impact en proposant quelque chose d’aussi fou.

 

Re-animator

  • Sortie : 1985
  • Durée : 1h35

 

Re-Animator : photo, Jeffrey CombsÇa va gicler chérie

 

Au début des années 1980, déjà fort d’une expérience de 10 ans dans le théâtre politiquement incorrect (qui lui a valu une arrestation), Stuart Gordon regrette le manque d’adaptations de Frankenstein, dans une période selon lui obsédée par les films de vampires. Lorsqu’on lui conseille Herbert West : Re-Animator, une nouvelle de Lovecraft, c’est le coup de foudre, l’alliance entre ses dérapages gore et sa passion pour Mary Shelley. L’auteur américain lui-même assumait de toute évidence son pastiche du classique de la littérature gothique.

À vrai dire, Re-Animator ne préserve pas grand-chose de son texte, si ce n’est justement ce détournement provocateur et fendard des thématiques de l’écrivaine. Chez Gordon, les cadavres sont ressuscités à l’arrache par un savant fou hilarant (campé par un Jeffrey Combs au sommet de sa gloire), parfois en pièces détachées, plus préoccupé par le meurtre que par leur mélancolie morbide. Gordon, inspiré par le sens de l’humour des employés de morgue rencontrés pendant ses recherches, pousse le concept de Frankenstein dans des retranchements réjouissants, moquant au passage d’autres monuments de l’horreur, comme Psychose, dont il pique la bande originale. Un film doudou pour amateurs de tripaille joyeuse.

 

Mentions honorables (ou presque)

 

Frankenstein contre le monstre de l'espace : photo“Finally, a worthy opponent !”

 

De toute évidence, ce cher monstre de Frankenstein a eu son lot de mésaventures dans les tréfonds du Z, et ce dès le lendemain du règne des Universal Monsters, de la suite de I Was a teenage Werewolf, I Was a Teenage Frankenstein (1957), au soporifique La Fille de Frankenstein (1958). Il devient une valeur sure des micro-budgets, quitte à économiser sur le maquillage. Outre les films de la Hammer, les années 1960 abritent des films Frankenstein qui accaparent son nom par pur opportunisme, comme le nanar de science-fiction Frankenstein contre le monstre de l’espace, où la créature est en fait un robot, envoyé sur Mars malgré l’attaque d’extra-terrestres venus constituer un cheptel de reproduction.

Le roman de Shelley étant tombé il y a bien longtemps dans le domaine public, ses déclinaisons fauchées, crapoteuses, mais surtout opportunistes sont légion, y compris dans les années 2010 : Bikini Frankenstein (parodie vaguement érotique qui ose citer explicitement le roman), Alvin et les Chipmunks contre Frankenstein, Frankenstein’s Amry (les nazis tentent leur chance), le crado Frankenstein vs. The Mummy (par le réalisateur des Terrifier), The Frankenstein Theory (l’obligatoire found-footage irregardable)…

 

Frankenstein vs. Baragon : photoC’est quand même autre chose que la version de Kenneth Branagh

 

Tous font pâle figure à côté des films d’Ishirô Honda. Le légendaire metteur en scène de Godzilla a en effet fait de la créature un monstre géant dans Frankenstein vs. Baragon et La Guerre des monstres. Des coproductions entre United Productions of America et la Toho, issues d’un Godzilla vs. Frankenstein avorté et très bien mis en scène par un Honda en pleine possession de ses moyens, aux côtés de la dream team de l’ère Showa du studio. L’antidote parfait aux adaptations d’un sérieux papal, qui substitue aux atermoiements mélancoliques quelques tonnes de caoutchouc. It’s alive !

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