Les cas de rougeole pourraient monter « très vite » au Québec

Les cas de rougeole pourraient augmenter « rapidement » au Québec, appréhende le directeur national de santé publique, Luc Boileau, qui presse les parents d’offrir une protection vaccinale à leurs enfants contre cette maladie d’ici à la fin de la semaine de relâche scolaire. Il s’inquiète d’ailleurs, comme plusieurs experts, de constater qu’une « fatigue vaccinale » s’installe dans la province.

Les autorités de santé ont fait état lundi d’une dizaine de cas de rougeole au Québec, dont sept dans la région de Montréal. Les milieux d’exposition qui sont affichés sur le site de Santé Montréal comprennent notamment un vol de Royal Air Maroc entre Casablanca et Montréal qui a eu lieu entre le 23 et le 24 février, mais aussi des écoles, des garderies et quelques centres hospitaliers, comme le CHU Sainte-Justine et l’hôpital Notre-Dame.

Le nombre de cas d’infections peut paraître bas, ont convenu lundi après-midi le Dr Boileau et la directrice régionale de santé publique de Montréal, Mylène Drouin, lors d’une conférence de presse tenue dans la métropole québécoise. Ces contaminations, qui se concentrent toutes dans la grande région de Montréal, font toutefois déjà de la province « l’épicentre » de la propagation de la rougeole au pays, qui reprend après plusieurs années sans qu’aucun cas de cette maladie n’ait été rapporté dans la province, a indiqué Luc Boileau.

« On a une préoccupation réelle pour la propagation de ce virus-là », a ainsi déclaré M. Boileau, selon qui le nombre de cas de rougeole recensé pourrait augmenter « rapidement » au Québec. « Ça peut monter vite, très vite », a-t-il insisté, tout en rappelant qu’une éclosion associée à l’importation d’un cas de rougeole au terme d’un voyage en 2011 avait causé une épidémie de plus de 750 cas contagieux au Québec.

Mme Drouin a d’ailleurs souligné que sur les sept cas de rougeole qui ont été rapportés jusqu’à maintenant dans la métropole québécoise, deux sont associés à des personnes qui ont contracté la maladie à l’étranger. C’est donc dire que « notre immunité collective n’est pas optimale », le virus étant visiblement en mesure de se propager d’une personne à l’autre une fois qu’il fait son entrée dans la province, a relevé la Dre Drouin. « C’est pour ça qu’il faut être vigilant et qu’on est inquiet », a souligné Luc Boileau, qui a insisté sur le fait que la rougeole est une maladie « qui peut entraîner des conséquences importantes, qui peuvent être très graves et même mortelles », en particulier pour les enfants en bas âge.

Mme Drouin a d’ailleurs fait état d’une moyenne de 78,5 % des enfants vaccinés dans les écoles primaires de la métropole ; un pourcentage qui atteint 82 % pour les écoles secondaires. Cela fait de Montréal la région dans la province où la couverture vaccinale des enfants contre cette maladie hautement contagieuse est la plus basse, a relevé M. Boileau, qui rappelle que 95 % des enfants devraient être vaccinés contre la rougeole afin de limiter au maximum le risque de propagation. Or, dans certaines écoles de la métropole, ce taux atteint seulement 30 %, a évoqué Mylène Drouin.

« Ce qu’on voit globalement, c’est qu’on a autour de 80 % de taux de vaccination dans les écoles primaires et secondaires. Mais il y a certaines écoles à Montréal où parfois, il y a plus d’hésitation vaccinale et donc les chiffres sont plus bas », a poursuivi la directrice régionale de santé publique de Montréal.

Or, « dès que le taux de vaccination diminue un tant soit peu, cette maladie reprend relativement facilement », explique au Devoir Hélène Carabin, professeure d’épidémiologie des maladies infectieuses à l’Université de Montréal. L’experte associe la baisse de la popularité des vaccins contre la rougeole aux théories du complot qui ont circulé dans les dernières années sur leurs effets indésirables, mais infondés, estime la professeure.

Fatigue vaccinale

Disant craindre que la rougeole se propage dans les écoles au retour de la semaine de relâche, Luc Boileau a pressé lundi les parents de profiter de cette période de congé scolaire pour faire vacciner leurs enfants contre cette maladie. Autrement, plusieurs jeunes risquent de manquer de précieux jours de classe dans les prochaines semaines après avoir contracté cette maladie, qui les forcera à s’isoler jusqu’à ce qu’ils ne soient plus contagieux.

« On doit faire des efforts dans presque toutes nos écoles » pour y augmenter le taux de vaccination contre la rougeole, a pour sa part déclaré Mme Drouin. Or, Luc Boileau s’inquiète de constater qu’une « fatigue vaccinale » s’est installée dans la province depuis le début de la pandémie de COVID-19.

« Il y a aussi des problèmes de désinformation. Peut-être que parmi les parents, il y a des gens mal informés sur les besoins de vaccination de leurs enfants, donc il y a sans doute plus de travail à faire de ce côté de la part des pouvoirs publics », relève pour sa part en entrevue Lara Gautier, qui est professeure adjointe à l’École de santé publique de l’Université de Montréal. Elle estime ainsi qu’un effort d’éducation et de sensibilisation s’impose au sujet des bienfaits de la vaccination, afin d’éviter que diverses maladies que l’on croyait avoir laissées derrière nous ne reprennent du terrain, au Québec comme ailleurs dans le monde. « Il faut faire des efforts pour améliorer l’information [transmise] sur les vaccins contre la rougeole, mais aussi sur toutes les autres maladies », poursuit-elle.

Caroline Quach-Thanh, pédiatre, microbiologiste-infectiologue au CHU Sainte-Justine et professeure titulaire à l’Université de Montréal, a d’ailleurs rappelé lundi pendant cette conférence de presse que chaque personne qui contracte la rougeole peut infecter jusqu’à 16 personnes avec qui elle est en contact si ces individus n’ont pas reçu « une couverture vaccinale complète ». Les personnes qui ont reçu deux doses de vaccin contre la rougeole pendant leur enfance n’ont toutefois pas à s’inquiéter, cette protection étant toujours valide, a précisé l’experte.

« Si vous êtes vacciné, vous n’avez rien à craindre. Mais si vous n’êtes pas vacciné, vous prenez un risque », a résumé Luc Boileau, qui écarte toutefois pour l’instant de rendre obligatoire la vaccination contre la rougeole. « On prend une route d’encouragement, de bien expliquer tous les avantages de la vaccination », a-t-il dit.

Vendredi dernier, Mylène Drouin avait prévenu les parents que deux cas de rougeole avaient été détectés dans la région montréalaise, dont un dans une école. Ce nombre n’a cessé de croître depuis.

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