Les pays producteurs d’énergies fossiles sont en voie de mettre fin à un climat viable, prévient l’ONU

Les signaux climatiques inquiétants ont beau être omniprésents, les pays continuent d’encourager une croissance de la production mondiale d’énergies fossiles, constatent les Nations unies dans un rapport publié mercredi, lequel lance un appel sans équivoque à quelques jours de la prochaine conférence climatique mondiale : il faut éliminer le recours au pétrole, au gaz et au charbon.

Selon les données compilées dans l’analyse publiée par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), les différents gouvernements prévoient produire en 2030 deux fois plus de combustibles fossiles que ce qui serait compatible avec l’objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris, soit limiter le réchauffement à 1,5 °C, par rapport à l’ère préindustrielle.

La production attendue d’ici la fin de la décennie est également au moins 69 % trop élevée pour limiter la hausse des températures à 2 °C, un seuil bien au-delà d’un climat planétaire jugé viable par les scientifiques et qui serait caractérisé par une multiplication des phénomènes climatiques extrêmes.

Les plans actuels de développement de l’industrie responsable de l’essentiel de la crise climatique entraîneraient une augmentation de la production mondiale de charbon jusqu’en 2030, et de la production mondiale de pétrole et de gaz jusqu’en 2050 au moins, selon le PNUE.

Gros producteurs

 

Le rapport s’attarde à la croissance prévue dans les 20 principaux pays producteurs, dont le Canada, les États-Unis, la Chine, la Russie et les Émirats arabes unis, pays hôte de la prochaine conférence climatique des Nations unies (COP28). À eux seuls, ces 20 États représentent 82 % de la production et 73 % de la consommation mondiale.

Même si 17 de ces pays se sont engagés à atteindre des émissions nettes nulles, soit la carboneutralité, « aucun ne s’est engagé à réduire la production de charbon, de pétrole et de gaz en vue de limiter le réchauffement à 1,5 °C », déplore le rapport.

Dans le cas du Canada, le rapport note que la production de pétrole et de gaz naturel doit croître au cours des prochaines années, essentiellement pour alimenter le marché mondial. Les infrastructures comme le pipeline Trans Mountain, qui appartient au gouvernement fédéral, ont justement été développées dans ce but. Même chose pour le projet LNG Canada, dont le gazoduc Coastal GasLink a été terminé récemment.

 

L’Association canadienne des producteurs pétroliers prévoit aussi que les investissements dans la production de pétrole et de gaz naturel atteindront 40 milliards de dollars cette année, notamment pour stimuler la croissance de la production.

Le pays produit environ 4,8 millions de barils par jour de brut et ce chiffre pourrait atteindre environ 5,3 millions de barils d’ici la fin de 2024, selon les analystes de S&P Global Commodity Insights. La majorité du pétrole provient des sables bitumineux, où les réserves totales avoisineraient les 160 milliards de barils. En ce qui a trait au gaz naturel, la production croissante est surtout liée aux projets de fracturation.

Éliminer les fossiles

 

La hausse de la production, au Canada comme ailleurs dans le monde, va toutefois à l’encontre des objectifs climatiques internationaux, selon le Secrétaire général des Nations unies, António Guterres.

« Nous ne pouvons pas faire face à la catastrophe climatique sans nous attaquer à sa cause première, soit la dépendance aux combustibles fossiles. La COP28 doit envoyer un signal clair : l’ère des combustibles fossiles n’a plus d’énergie, sa fin est inévitable. Nous avons besoin d’engagements crédibles pour accroître les énergies renouvelables, éliminer progressivement les combustibles fossiles et renforcer l’efficacité énergétique, tout en garantissant une transition juste et équitable », a-t-il fait valoir mercredi, dans une déclaration accompagnant le rapport du PNUE.

« Les projets des gouvernements visant à accroître la production de combustibles fossiles compromettent la transition énergétique nécessaire pour parvenir à des émissions nettes nulles et remettent en question l’avenir de l’humanité », a ajouté Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE.

L’un des principaux auteurs du rapport, Ploy Achakulwisut, met par ailleurs en garde contre la tentation d’utiliser le gaz naturel en le présentant comme une énergie de « transition ». « La science indique que nous devons commencer à réduire la production et l’utilisation du charbon, du pétrole et du gaz dès maintenant, tout en développant les énergies propres, en réduisant les émissions de méthane de toutes les sources et en prenant d’autres mesures climatiques, afin de maintenir l’objectif de 1,5 °C. »

Le PNUE déplore par ailleurs le soutien financier public au secteur des énergies fossiles. Les subventions canadiennes aux énergies fossiles ont atteint 38 milliards de dollars américains (51,5 milliards de dollars canadiens) l’an dernier, selon une analyse publiée en août par des chercheurs du Fonds monétaire international. La plus grande part de ce montant est toutefois imputable aux coûts liés aux conséquences de la pollution de l’air et de la crise climatique.

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