l’homme remis en liberté, que risque-t-il dans l’affaire Hedi ?

8 min read

Policier en prison à Marseille : l'homme remis en liberté, que risque-t-il dans l'affaire Hedi ?

Le policier de la BAC de Marseille qui a reconnu avoir tiré au LDB sur le jeune Hedi en marge des émeutes de juillet dernier est remis en liberté ce vendredi 1er septembre. Sa mise en examen tient toujours. Que risque-t-il ?

[Mis à jour le 1er septembre 2023 à 13h16] Il va sortir de prison. Le policier marseillais mis en examen pour avoir violemment agressé le jeune Hedi, lors des nuits d’émeutes de juillet derniet, est remis en liberté ce vendredi 1 er septembre après avoir passé 40 jours en détention provisoire. La justice a accepté la demande de remise en liberté déposée par l’avocat de l’agent de la BAC de 35 ans, selon les informations de La Provence.

L’homme n’est toutefois pas sorti d’affaire. Il est placé sous contrôle judiciaire et a interdiction d’exercer ou de rentrer en contact avec ses trois collègues également mis en cause dans l’affaire Hedi. C’est d’ailleurs pout éviter tout contact entre les fonctionnaires de police que l’homme a été placé en détention provisoire en juillet 2023.

Si le policier soupçonné de violences contre Hedi a longtemps nié les faits que lui reproche le jeune homme de 22 ans, il a fini par coopérer à l’enquête et a reconnu avoir tiré au flash-ball en direction de la victime. Il a expliqué son geste par le fait que Hedi aurait “armé son poing” pour le frapper avec un objet, une version qui n’a pas convaincu les magistrats.

Aveu du policier incarcéré

“Voilà maintenant huit magistrats qui se sont penchés sur ce dossier et qui y ont trouvé les éléments nécessaires pour mettre en détention ce monsieur. Cela révèle surtout la nécessité de protéger le déroulement de l’instruction. La police doit assumer cette incarcération, qui va dans le sens de la justice” a indiqué Jacques-Antoine Preziosi, l’avocat d’Hedi. L’avocat de C.I., le policier incarcéré, n’a pas encore fait de déclaration publique après le verdict. Le parquet a aussi partiellement débouté la demande du contrôle judiciaire de l’un des trois autres fonctionnaires de la BAC (Brigade anti-criminalité) mis en cause dans cette affaire de violences policières. Il pourra retrouver son travail mais sans être sur la voie publique.

Afin de favoriser sa libération, le policier incarcéré a reconnu spontanément être l’auteur du tir de LBD sur Hedi. Il a expliqué son geste par le fait que ce jeune homme aurait “armé son bras poing fermé pour jeter un objet”. L’avocat général n’a pas été convaincu par ce témoignage : “les déclarations du policier, qui a reconnu les faits donnent “une perspective”, mais le risque de “concertation frauduleuse” est à prendre en compte. La détention provisoire est requise afin de “préserver l’information jusqu’à l’interrogatoire” selon l’AFP.

Que risque le policier après ses aveux dans l’affaire Hedi ?

Selon l’article 222-12 du Code pénal, le policier mis en examen dans l’affaire Hedi encourt entre sept et dix ans d’emprisonnement et de 100 000 à 150 000 euros d’amende. Parmi les précédents cas de policiers jugés pour des tirs de LBD, celui d’un policier jugé devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir blessé un “gilet jaune” par des tirs de lanceur de balles de défense au cours d’une manifestation le 2 février 2019. L’homme avait écopé d’une amende de 1 500 euros. Lors de son procès en novembre 2021, le parquet avait requis six mois de prison avec sursis à l’encontre du policier. Le plaignant avait été blessé au bas du visage et à l’abdomen.

Autre exemple avec des faits qui remontent au 8 juillet 2009. Des policiers étaient intervenus pour repousser des manifestants rassemblés devant un squat à Montreuil, en Seine-Saint-Denis. L’utilisation trop musclée du LBD sur l’un d’entre eux était devenue un symbole des violences des forces de l’ordre. Le policier impliqué avait été reconnu coupable du tir et condamné en appel en 2018 à 18 mois de prison avec sursis et 24 mois d’interdiction de port d’arme. 

Que s’est-il passé entre les policiers et Hedi ?

Depuis le 20 juillet dernier, un policier appartenant à la Brigade Anti-Criminalité (BAC) de Marseille se trouve en détention provisoire à la suite d’accusations de violences portées par Hedi, un jeune homme âgé de 22 ans. Cette affaire a suscité un vif intérêt dans l’opinion publique et a mis en lumière certaines tensions au sein des forces de l’ordre. Les faits reprochés au policier concernent des violences en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné une Incapacité Totale de Travail (ITT) supérieure à huit jours, avec usage ou menace d’une arme. Sur les quatre policiers mis en examen dans cette affaire, trois d’entre eux ont finalement admis avoir exercé des violences sur Hedi. Ces actes ont été filmés par les caméras de vidéosurveillance, laissant peu de place au doute quant à la véracité des allégations de la victime. 

Hedi, soutenu par des témoins directs et des éléments apportés à La Provence, a décrit avec précision les violences qu’il aurait subies ce jour-là. Des témoignages étayés par une vidéo récente publiée par Konbini, qui a contribué à renforcer la crédibilité des allégations de la victime. Cette preuve visuelle avait ainsi mis en difficulté la version défendue par les policiers incriminés. 

Si les faits ont eu lieu en marge d’une nuit d’émeutes à Marseille, Hedi et son ami ne participaient pas aux violences urbaines selon le jeune homme victime de violences. Ils se contentaient de suivre un hélicoptère qui survolait la citée phocéenne quand ils ont croisé quatre ou cinq policiers de la BAC en civil, mais portant une arme à la ceinture, un flash-ball autour du cou et équipés de matraques, près du cours Lieutaud. “On leur a dit bonsoir, mais on a vite compris qu’ils étaient énervés et fermés à la discussion”, a ajouté Hedi dans son témoignage.

Interrogés sur ce qu’ils faisaient par les policiers, Hedi et son ami sont partis en courant, mais le premier a été touché par une balle de flashball qui l’a cloué au sol. Les deux jeunes hommes ont ensuite été pris pour cibles, les policiers les auraient attaqués à “coups de matraque et tirs de flash-ball dans la tête”, à courte distance, selon des propos de l’avocat d’Hedi, maître Jacques Preziosi, rapportés par France Bleu. Le bilan est lourd pour Hedi : un hématome intra-cérébral, une fracture de la mâchoire et une perte de la vision de l’œil gauche. Laissé au sol, Hedi dit avoir trouvé la force de se déplacer et s’être retrouvé devant une épicerie, dont le gérant l’a conduit à l’hôpital. Arrivé dans un état grave, il est appelé “le miraculé” par l’équipe médicale.

De quoi est suspecté le policier incarcéré à Marseille ?

Le fonctionnaire de la BAC placé en détention provisoire est soupçonné de violences policières. Plus précisément, le parquet de Marseille a ouvert une information judiciaire pour “violences en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné une ITT supérieure à huit jours avec usage ou menace d’une arme”.

Si quatre des huit policiers placés en garde à vue dans un premier temps ont été relâchés, les quatre autres ont été mis en examen et le fonctionnaire en question a été placé en détention provisoire sur décision du juge, qui a considéré que la gravité des faits était de nature à le priver de sa liberté en attendant la suite de la procédure judiciaire. Les trois autres agents sont sous contrôle judiciaire avec une “interdiction d’entrer en contact avec les co-auteurs, la victime et les autres protagonistes du dossier et interdiction d’exercer l’activité professionnelle de fonctionnaire de police”. Une nouvelle enquête a été ouverte le 24 juillet par le parquet de Marseille pour chercher à établir la responsabilité de policiers marseillais après la plainte déposée par Hedi, rapporte La Provence.

La détention du policier à l’origine de la colère de la profession

L’incarcération du policier marseillais, le 20 juillet, a été l’élément déclencheur du mouvement de protestation en cours au sein de la police. Une colère telle qu’elle pousse certains agents à déserter les commissariats ou n’assurer que le service minimum. Après une semaine de silence, le ministre de l’Intérieur s’est finalement entretenu avec les syndicats de police le jeudi 27 juillet. Une rencontre qui a “satisfait” les centrales qui ont toutes décrit un ministre “à l’écoute” de leurs revendications et “plutôt ouvert à toutes les discussions” selon Grégory Joron, secrétaire général du syndicat Unité SGP police-UFO, contacté par BFMTV.

You May Also Like

More From Author