La charité à l’ère d’Uber ? Deux ans et 250 000 $ plus tard, une plateforme Web créée par une PME québécoise veut convaincre les entreprises, les organisateurs d’événements et de festivals et même les écoles de la province d’être plus généreux avec les organismes communautaires et les causes sociales dans leur localité.
Appelée Nooé, la plateforme Web qui jusque-là s’appelait le projet Team Forward est devenue cet été une fondation à part entière. Le projet en question a vu le jour avant la pandémie, mais c’est seulement dans les deux dernières années que le modèle a réellement pris forme.
Sa technologie laisse l’utilisateur choisir à quel organisme il souhaite remettre de l’argent, parmi une liste non exhaustive de quelque 3000 causes triées sur le volet. Cela prend la forme d’un don dûment enregistré, qui peut être fourni par l’employeur de l’utilisateur, ou qui peut faire partie du prix à payer pour accéder à un événement, quel qu’il soit.
La mission de Nooé n’a pas changé depuis le début : simplifier le don caritatif personnel ou corporatif pour rehausser la place de la philanthropie au Québec. Son argument est simple : le don de charité moyen au Québec était de 249 $ par personne l’an dernier, ce qui est loin sous la moyenne canadienne de 340 $.
« On croit qu’on peut aider les gens à être plus généreux », assure la directrice générale de Nooé Sarah-Maude Joly.
Sensibiliser à tous les âges
La principale dirigeante de Nooé espère convaincre d’autres organisations partout dans la province de joindre son mouvement. Sa plateforme peut être utilisée gratuitement, si bien que tout l’argent remis à une cause se rend à destination.
Son offre cible trois cas d’usage : les entreprises qui souhaitent mobiliser leurs employés en leur demandant de choisir à qui elles feront un don, les événements qui veulent inclure dans le prix de leurs billets une somme qui sera remise à la communauté locale, et les écoles qui veulent sensibiliser les jeunes à l’importance de s’engager — en donnant uniquement de leur temps — pour des activités qui leur tiennent à coeur.
« On a réalisé depuis 2019 à quel point il existe de nombreux organismes au Québec qui ont besoin de l’aide du public », explique Florence Petit-Gagnon, cofondatrice de Nooé. « On voit aussi que les gens tiennent vraiment à ces causes. On a donc décidé d’utiliser la technologie pour brasser un peu la cage et faciliter l’aide caritative. »
Nooé ne veut laisser aucun dollar dormir sur la table : son site permettra bientôt aux particuliers d’effectuer des dons directement aux organismes de leur choix, qu’ils soient déjà enregistrés ou pas sur la plateforme. « On va faire les vérifications d’usage d’abord » pour s’assurer que tout est légal, assurent Mmes Joly et Petit-Gagnon.
Officiels, ces dons permettent d’obtenir un reçu qui peut ensuite être déduit de notre déclaration fiscale…
Donner au suivant 2.0
Lorsque Nooé a vu le jour en 2019 sous le nom de Projet Team Forward, l’idée était de créer une plateforme Web grâce à laquelle Mirego, l’entreprise au sein de laquelle le projet a vu le jour, pouvait laisser ses employés décider de ses activités philanthropiques.
La PME a rapidement décidé de rendre sa plateforme publique et accessible à d’autres entreprises. Le géant des technologies agricoles Premier Tech, de Rivière-du-Loup, qui a acquis Mirego en 2021, a adopté le projet par la suite.
Premier Tech et Mirego étant des entités commerciales à part entière, il semblait logique pour la plateforme de devenir autonome. « On peut se concentrer sur nos activités. Nous sommes indépendants, ce qui nous permettra aussi de parler à d’autres entreprises des secteurs de la technologie et des communications », dit Florence Petit-Gagnon.
Nooé espère aussi faire évoluer l’idée très répandue au Québec, selon laquelle l’État et l’Église sont là pour s’occuper de la philanthropie. « Ce n’est pas tout à fait le cas », dit Sarah-Maude Joly. « D’ailleurs, on connaît très peu de gens qui vont encore à l’église. Disons que la relève est peu présente… »