Ouverture en avril de la première usine de compost à Montréal

Quinze ans après l’annonce de sa construction, une première usine de traitement des matières organiques à Montréal entrera finalement en service d’ici quelques jours. Les retards et les imprévus au fil des ans ont considérablement fait exploser la facture.

« À compter du mois d’avril, la Ville va tester les équipements à l’intérieur avec des vraies matières organiques », confirme au Devoir le cabinet de la mairesse Valérie Plante. Les travaux du Centre de traitement des matières organiques de l’arrondissement Saint-Laurent « sont à 95 % complétés », précise-t-on.

Située dans l’arrondissement de Saint-Laurent, sur le boulevard Henri-Bourassa Ouest, l’usine devrait être en mesure de traiter annuellement, par compostage, 50 000 tonnes de résidus verts et alimentaires.

À quelques jours de la mise en service, la Ville de Montréal assure qu’elle n’injectera pas davantage d’argent dans le projet. Car voilà, au fil des ans, les retards et dépassements de coûts ont fait gonfler la facture qui atteint maintenant 372 millions de dollars pour l’usine de Saint-Laurent, ainsi que pour la future usine de biométhanisation de Montréal-Est.

Une longue saga

En 2009, l’administration de Gérald Tremblay avait annoncé son intention de construire quatre usines de traitement des matières compostables pour une inauguration en 2012. L’année suivante, elle ajoutait une cinquième usine, cette fois de biométhanisation. Le coût pour l’ensemble des projets a été estimé à 237 millions de dollars, en 2013.

Après plusieurs tergiversations, Montréal a finalement décidé d’aller de l’avant avec deux projets, en 2019. Elle a depuis accordé des contrats totalisant près de 372 millions pour la construction et l’exploitation à Suez Canada Waste Services, devenue par la suite Veolia.

Si l’usine de Saint-Laurent entrera sous peu en service, le centre de biométhanisation de Montréal-Est, quant à lui, « devrait recevoir les premiers camions » de matières organiques dès cet automne, assure Montréal.

Or, dans un rapport publié en 2021, la vérificatrice générale de Montréal, Michèle Galipeau soulignait l’explosion des coûts des usines : le coût du projet « pourrait être de près de 2 fois ce qui avait été prévu 6 ans plus tôt pour les 5 infrastructures, alors que seulement 2 seront réalisées […] ».

« Très bonne nouvelle »

Malgré les dépassements de coûts, la mise en service de l’usine est « une très bonne nouvelle », dit Karel Ménard, directeur du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, « En faisant le traitement à Montréal, ça va réduire l’impact en lien avec la gestion et le transport des matières organiques de l’ouest de la ville. Ça va se faire à proximité de la cueillette », ajoute-t-il.

Le maire de Saint-Laurent, Alan DeSousa, avait piloté le projet des centres de compostage sous l’administration Tremblay. Quinze ans plus tard, il juge que les usines sont toujours nécessaires pour traiter localement les matières organiques. Il juge cependant inacceptables l’explosion des coûts et les retards survenus sous l’administration de Valérie Plante. « Je déplore que l’administration n’ait pas fait l’analyse nécessaire pour amener le bateau à bon port dans le respect de la capacité de payer des contribuables », dit-il en évoquant d’autres projets marqués par d’importants dépassements de coûts, qu’il s’agisse de l’usine d’ozonation ou du centre de transport Bellechasse.

« Ça va être le centre de compostage le plus cher au monde, croit l’élu. J’ai hâte de voir si les équipements vont être plaqués en or. »

« Il est déplorable que le projet de valorisation de la matière organique de la Ville de Montréal ait coûté plus de 350 millions aux contribuables alors que des entreprises privées offraient déjà ce service pour une fraction du prix », indique pour sa part Kevin Morin, directeur général du Conseil des entreprises en technologies environnementales du Québec.

Il dit maintenant espérer qu’une obligation éventuelle de collecter les matières organiques provenant de commerces et des industries pourra être réalisée par les collecteurs privés. Selon lui, cela aurait pour effet d’éviter une spirale d’augmentation des coûts.

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