Plus de 300 dossiers de parrainage québécois refusés puis rouverts à cause d’un cafouillage administratif

Des problèmes administratifs entre les ministères fédéral et provincial de l’Immigration ont semé l’émoi chez de futurs résidents permanents qui vivent déjà au Québec. Le mois dernier, ces personnes, parrainées par leur conjoint ou conjointe via le programme de réunification familiale, ont eu la mauvaise surprise d’apprendre que leur dossier avait été initialement refusé, car le certificat de sélection du Québec (CSQ) n’avait jamais été reçu par Immigration Canada.

« Puisque votre répondant n’a pas fourni de CSQ comme preuve qu’il / elle satisfait aux exigences provinciales, […] [il] est donc inéligible [sic] à parrainer votre résidence permanente », peut-on lire dans une lettre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), consultée par Le Devoir.

Me Joanie Landry, du cabinet Athena, a des clients qui ont reçu une telle lettre et elle n’est pas la seule. Il y a un mois, de nombreux avocats en immigration ont commencé à échanger sur ce refus soudain qui touchait de nombreux couples engagés dans un parrainage.

Le problème ? Le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) a pourtant confirmé avoir envoyé dans les délais (soit moins de 30 jours) les CSQ en question.

Me Benoît Bessette confirme que dans un cas, il a bel et bien reçu le CSQ de son client. Bien qu’il incombe normalement au MIFI de faire l’envoi de ce document au gouvernement fédéral, l’avocat dit l’avoir aussi envoyé à IRCC — deux fois valent mieux qu’une. Alors pourquoi le dossier a-t-il été refusé ?

« Je ne comprends pas exactement ce qui s’est passé, mais ça semble être un problème de transmission », a-t-il affirmé. Me Bessette déplore n’avoir eu aucune réponse des autorités fédérales. Le formulaire Web qu’il leur a envoyé pour faire la lumière sur ce cas est demeuré sans réponse.

IRCC reconnaît le problème

 

Vérification faite : IRCC dit avoir récemment été mis au courant d’un « délai administratif » dans la transmission des certificats de sélection du Québec de plus de 300 dossiers. Se gardant bien d’attribuer la faute à son palier de gouvernement ou à celui du Québec, le ministère fédéral assure que le problème est maintenant réglé. « Les CSQ retardés ont été ajoutés aux dossiers, et les dossiers touchés continuent d’être traités », a déclaré au Devoir la porte-parole Isabelle Dubois.

Aucune demande touchée par ce problème de transmission du CSQ n’aurait été refusée. « IRCC, en collaboration avec MIFI, procède également à un examen des processus de transmission des CSQ, pour s’assurer que ces délais ne se reproduisent pas à l’avenir. »

Selon nos informations, des membres de l’Association québécoise des avocats et avocates en immigration (AQAADI) ont suivi le dossier de près et ont eu des rencontres avec des responsables et des techniciens à IRCC.

Quant au MIFI, il n’a pas été en mesure de répondre aux questions du Devoir dans les délais impartis.

Des brèches dans le système

 

« Le simple particulier qui fait sa demande par lui-même, je me mets à sa place. En recevant une telle lettre de refus, il peut penser que c’est lui qui a mal fait son dossier alors qu’il n’est pas au courant que le problème est généralisé. Ces gens-là doivent vivre un stress très intense », a dit Me Ismaël Boudissa, qui a conseillé des clients en lien avec ce problème.

Selon lui, toute personne qui fait une demande d’immigration est en droit de s’attendre à un meilleur service de la part de l’administration publique, surtout qu’elle paie des milliers de dollars en frais. « Après ça, on va lui dire que sa demande tombe à l’eau pour une erreur qui vient non pas d’elle mais de l’administration publique ? »

Me Joanie Landry se désole pour sa part que de telles erreurs puissent survenir. « On met en place des politiques d’intérêt public pour favoriser le regroupement familial, mais finalement, alors que sur papier ça fonctionne, les services ne sont pas au rendez-vous », a-t-elle soutenu. « On fait face à des brèches dans le système. »

Pour Me Boudissa, les demandeurs sont souvent pris malgré eux dans des problèmes qui se situent plutôt au niveau des deux paliers de gouvernement. « On est habitué d’assister au jeu de ping-pong entre IRCC et le MIFI qui se renvoient la balle. » Or, peu importe à qui revient la faute, « ce sont nos clients qui en subissent les conséquences », a-t-il ajouté.

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