Une consolidation vue d’un mauvais œil
Shawn Layden a sa propre vision de l’industrie et n’a pas hésité à exprimer son point de vue, qui est forcément intéressant vu l’historique du bonhomme. Selon lui, le marché du jeu vidéo fait actuellement face à trois problèmes majeurs, le premier étant la consolidation, qui serait « une ennemie de la créativité ». Il évoque ici à demi-mot les larges fusions comme Microsoft et Activision, mais aussi les rachats successifs d’Embracer qui ont conduit à la fermeture de studios (mais pas de mention de Tencent, évidemment).
Deuxième problème selon lui, le coût exponentiel de la production de jeux. Produire des AAA devient de plus en cher et il en sait quelque chose, étant donné qu’il régnait en maitre chez PlayStation jusqu’en 2019. Les dernières énormes productions en provenances de chez PlayStation étaient chiffrées aux alentours de 200 millions de dollars, soit le budget d’un blockbuster au cinéma. Des investissements qui deviennent donc de plus en plus risqués, et qui sont dangereux pour l’avenir.
Le danger des GAFAM
Mais la vraie menace qui plane au-dessus du monde du jeu vidéo, toujours selon Shawn Layden, c’est bien l’arrivée de Google, Amazon ou encore Apple dans le milieu, qui essayent de « perturber » l’industrie du jeu vidéo en obtenant leurs parts du gâteau. Layden veut ici montrer que lorsqu’un acteur extérieur apporte un bouleversement dans un milieu, ce n’est pas forcément pour le meilleur. Il cite l’arrivée des chansons à 0,99 dollars sur iTunes ou bien l’omniprésence de Netflix dans le marché du divertissement, deux exemples qui ont montré leurs limites aujourd’hui. Selon l’ex-boss de PlayStation, l’industrie du jeu vidéo doit elle-même se renouveler avant qu’un géant de la tech viennent perturber le marché :
« J’espère que le jeu vidéo sera la première industrie dans laquelle nous nous perturberons nous-mêmes. Où il ne faut pas un Google ou un Amazon pour renverser complètement la table. Nous devons être suffisamment intelligents pour voir ces changements arriver et nous préparer à cette éventualité. »
Conscient de l’ironie d’une telle déclaration de la part de quelqu’un qui a travaillé pour Sony, qui a justement intégré le jeu vidéo de cette manière, il affirme qu’à l’époque, le constructeur japonais était conscient de ses propres limites contrairement aux géants de la tech actuels :
« PlayStation savait que nous ne pouvions pas faire ce que Sega et Nintendo faisaient, nous ne savions pas suffisamment comment le faire. Nous devions être la plateforme d’éditeurs tiers, nous devions donc embarquer Namco, Square, EA, Activision. »
Pour le moment, les GAFAM n’ont réussi à mettre qu’un pied dans le marché du jeu vidéo et Apple est probablement l’acteur qui s’en sort le mieux, en ne proposant qu’un service. Google a échoué de manière spectaculaire avec Stadia tandis qu’Amazon cherche encore son grand succès en tant qu’éditeur, malgré des partenariats qui se multiplient. L’avenir nous dira si un acteur externe peut vraiment bousculer le marché ou non.