Poursuite en diffamation contre Radio-Canada : des informations contradictoires auraient dû être mises en évidence, selon les policiers de Val-d’Or

Les policiers de Val d’Or, qui poursuivent en diffamation Radio-Canada, tentent de démontrer que la journaliste n’a pas fait son travail avec diligence en mettant en évidence les contradictions d’une femme autochtone, qui était au coeur du reportage qui a secoué tout le Québec à l’automne 2015.

Brigitte Dufresne faisait partie des policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) déployés à Val d’Or en octobre 2015, pour enquêter sur les allégations des femmes autochtones dans le reportage Abus de la SQ. Les femmes autochtones brisent le silence. C’est dans ce cadre que la policière a rencontré Priscilla Papatie.

Dans le reportage, Mme Papatie alléguait que des policiers l’avaient arrêtée puis laissée plus loin en ville, dans le stationnement du Walmart, après l’avoir bousculée, avoir lancé ses souliers dans la neige et vidé de la bière dans sa sacoche. Elle indiquait que les événements étaient survenus « en hiver ». 

Or, lorsqu’elle a rencontré la policière Brigitte Dufresne quelques semaines plus tard, Mme Papatie a plutôt situé les événements en octobre, a révélé la policière.

L’enquêtrice a rencontré une amie de Mme Papatie, qui était présente lors de l’arrestation. Cette amie a recueilli le témoignage de Mme Papatie lorsqu’elle est revenue au bar, 45 minutes plus tard. « Elle est certaine que l’événement se passe entre le 11 août 2014 et les deux semaines suivantes, car c’est le seul temps qu’elle est allée à Val d’Or », a affirmé la policière qui lisait ses notes sténographiques devant le tribunal.

Enquête journalistique v. enquête policière

 

Devant l’insistance de l’avocat des policiers, Me Marco Gaggino, qui marquait bien les éléments de temps contradictoires, l’avocate des défenderesses a soulevé une objection. « Ma prétention, c’est qu’on ne peut pas comparer une enquête journalistique à une enquête policière, a soutenu MGeneviève Gagnon. Et que, par conséquent, ce témoignage n’est pas pertinent parce que Mme Dupuis [la journaliste] n’a pas eu accès à l’enquête de Mme Dufresne, qui a été faite après le reportage, par ailleurs, et que c’est une façon détournée de faire une preuve de véracité. »

De son côté, l’avocat des policiers estime être dans son droit. « Quant à nous, la preuve est tout à fait pertinente, a rétorqué Me Gaggino. Si Mme Dupuis avait rencontré l’amie de Mme Papatie — et quand Mme Dupuis a rencontré Mme Papatie, elle lui avait dit qu’elle était avec deux amis —, ce n’était pas une information inconnue. Elle avait juste à faire exactement la même démarche. Ce n’est pas parce que c’est une policière. Ça ne change rien. On n’a même pas essayé la démarche. »

Le juge Babak Barin a décidé de laisser la policière poursuivre son témoignage, puisque le procès, qui s’étalera sur plusieurs semaines, n’est est encore qu’à ses tout débuts. « Vous aurez toute la chance d’argumenter lorsque viendra le temps des plaidoiries pour indiquer si c’est pertinent ou pas », a tranché le juge. 

La policière sera contre-interrogée en après-midi.

À voir en vidéo

You May Also Like

More From Author