Que valent les albums de Vianney, Eddy de Pretto et Isabelle Adjani ? Nos critiques !

Vianney | “A 2 à 3”

C’est mieux à plusieurs. Vianney est à un tournant de sa carrière. Devenu en quelques années, et une poignée de tubes, l’un des artistes les plus populaires de la chanson française, le chanteur de 32 ans est aussi devenu papa pour la première fois. Une bonne raison de prendre du recul et de repenser son métier. Ainsi, Vianney fait une pause des tournées pendant au moins trois ans, pour se consacrer à sa famille. Quoi qu’il en soit, le nouveau parrain du Téléthon est partout : toujours coach de “The Voice”, il multiplie les collaborations et vient aussi de sortir un nouvel album-concept, baptisé “A 2 à 3”, numéro un des ventes. Comme son nom l’indique, le disque est collaboratif (c’est à la mode !) et lui permet de créer tout en occupant l’espace médiatique, en attendant son véritable retour dans un petit bout de temps. Sur ses 19 titres (un peu long), Vianney prouve une nouvelle fois son talent d’auteur, compositeur et d’interprète, et délivre ses messages humanistes et ses belles valeurs, tout en invitant la crème (Zazie, Florent Pagny, Kendji Girac, Soprano, MIKA, Gims ou Ben Mazué). Il frappe fort également et réalise plusieurs rêves au passage en collaborant avec Ed Sheeran, Renaud, MC Solaar ou Jean-Louis Aubert, tout en mettant en avant la jeune génération, de Mentissa à Janie. Avec ce cast XXL, on pouvait parfois s’attendre à un peu plus fort (les duos avec Florent Pagny ou Ed Sheeran par exemple). Et si on peut reprocher au projet de partir dans tous les sens et de ressembler davantage à une compilation, la faute au concept ceci dit, Vianney garde tout le même le cap, même s’il perd parfois en authenticité pour tomber dans des productions qui manquent de finesse, dotés de gimmicks faciles (“Le firmament” avec Gims, “Je suis fou” avec Kendji et Soprano). Il n’est jamais aussi juste que lorsqu’il trouve l’équilibre comme sur “Comment on fait” avec Zazie (un tube !) ou “L’antidote” avec Ben Mazué, dont l’alchimie est sublime, même si le climax reste “Tu me guéris” avec Mentissa. A quand l’album commun ?JG

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Eddy de Pretto | “Crash Coeur”

Au secours, j’ai besoin d’amour. Le “Kid” qui distribuait des uppercuts à la masculinité toxique a bien grandi. À 30 ans, un Eddy de Pretto plus apaisé s’autorise enfin l’impensable sur son troisième album “Crash Coeur” : l’amour ! Autrefois « fermé sans sentiments », le chanteur place la quête du bonheur comme la clé de voûte de ce disque groovy et queer, qui rend, dès le titre d’ouverture “R+V” un hommage appuyé aux icônes LGBTQ+ ayant ouvert les chemins de la liberté. Si la mélancolie lui colle à la peau comme en attestent “Personne pour l’hiver” ou la ballade déchirante “Maison” (à vous briser le coeur), Eddy de Pretto brandit l’espoir comme un totem. « J’ai qu’un but dans la vie, c’est d’être bien avec moi-même » clame-t-il sur le bien-nommé “biennn” – l’une des meilleurs pistes du projet – et le musicien finit même par se convaincre en toute fin qu’il a tout pour être “heureux :))))”. Mais pour en arriver là, que de montagnes russes ! L’amour c’est effectivement beau, déchirant, transcendant, injuste, un rollercoaster permanent et en musique, ça se traduit par des variations de rythmes, des juxtapositions sonores hybrides où son héritage de chanson française s’entrechoque à des pulsions R&B des années 2000 (“Mendiant de love”), des saillies électro et des reflets hip-hop. Le tube “Love’n’Tendresse” et le génial “CRASH <3” est le meilleur exemple ce que le chanteur peut offrir d’unique sur une scène musicale parfois (souvent ?) trop lisse et uniforme, même si certains essais, comme l’irritant “pApA $ucre”, tombent à côté. YR

Ça ressemble à la belle échappée romantique d’un garçon qui parle de garçons
A écouter : la claque “Love’n’Tendresse”, “CRASH <3”, le fougueux “être biennn”
A zapper : “pApA $ucre”, à la prod très bruyante

Isabelle Adjani | “Adjani, bande originale”

Possession musicale. « This is the story of an actress : Isabelle Adjani ». La voix caverneuse de Peter Murphy, leader du groupe culte Bahaus, donne le ton : cet album sera à la fois classieux, aventureux et onirique. Et surtout très attendu. Commencé il y a 17 ans, l’album “Adjani, bande originale” d’Isabelle Adjani voit enfin le jour ! 40 ans après Serge Gainsbourg, c’est un autre pygmalion, Pascal Obispo, qui lui a confectionné ce deuxième opus dans lequel la voix de l’iconique actrice sert de fil rouge sur des chansons plus expérimentales que radiophoniques. Lancé en éclaireur, le single “Les courants d’air” avec Gaëtan Roussel sonne même comme une anomalie au milieu des cordes très cinématographiques, qui se frottent à un univers électro brumeux évoquant énormément celui de Christophe. Sa figure plane d’ailleurs sur tout l’album, tout comme sa voix chevrotante résonne sur l’intense “Où tu ne m’attendais pas”. Comme celle de deux autres fantômes du passé : Daniel Darc et Philippe Pascal. Les vivants conversent avec les morts, à moins que ce ne soit l’inverse. Loin d’être mortifère, “Bande originale” lève un peu le voile sur le mystère Adjani, autant qu’il l’obscurcit, révélant par touches ses goûts, ses inspirations, ses amours… Cherchant souvent du côté de l’Asie (“Shamisen”, “D’accord”, “Hara-Kiri”), l’actrice remet au goût des jours les voix 80’s inoubliables de Simon Le Bon (Duran Duran) et David Sylvian (Japan) aux côtés d’Etienne Daho, Benjamin Biolay, Seal, Youssou N’Dour ou Akhenaton. Seule petite déception : certains morceaux (“D’accord”, “Japan Airlies”, “Pour ce que je sais de toi”) manquent de cohérence, comme si plusieurs idées musicales ont été collées sans véritable logique. TB

Ça ressemble à un album envoûtant et mystique
A écouter : l’intense “C’est lui” avec Simon Le Bon, “Les courants d’air”
A zapper : “D’accord” et “Japan Airlies”, un peu confus, “Homme et femme”