Le gouvernement du Québec et la Ville d’Oka appellent les chefs mohawks de Kanesatake à « mettre de côté » leurs différends pour régler des dossiers urgents, dont celui du dépotoir illégal, contaminé et abandonné de l’entreprise G&R Recyclage.
« Certains dossiers méritent une attention urgente de la part du conseil de bande. Il en va de la santé des [résidents de Kanesatake] », écrit le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit, Ian Lafrenière, dans une lettre envoyée mercredi aux sept chefs du conseil de bande de Kanesatake, dont Le Devoir a obtenu copie.
Deux factions s’affrontent depuis un an au sein du conseil mohawk. Cinq chefs contestent ouvertement les décisions du grand chef Victor Bonspille et de sa soeur jumelle, la cheffe Valerie Bonspille.
Les tensions se sont exacerbées dans les dernières semaines. Le grand chef Victor Bonspille a autorisé, le 25 octobre, que les portes du conseil de bande soient enchaînées, paralysant du coup la vie politique de la communauté. Une injonction provisoire d’une durée de dix jours a forcé le retrait des cadenas, lundi.
Dans sa missive, Ian Lafrenière écrit être au fait de l’affrontement qui plombe la vie démocratique de la communauté : « Devant les désaccords entre les membres du conseil de bande de Kanesatake, il est important pour moi de poursuivre les discussions avec les deux groupes qui se sont formés. »
Le ministre québécois note par ailleurs s’en remettre à Ottawa pour trancher les conflits qui opposent les chefs mohawks.
« Je vous invite donc à mettre de côté vos différends pour agir dans le dossier de G&R Recyclage immédiatement », avance-t-il.
Ce dossier médiatisé depuis des années traîne en longueur. En 2020, le ministère de l’Environnement du Québec avait révoqué le permis d’exploitation de l’entreprise qui appartient aux frères mohawks Robert et Gary Gabriel.
Au fil des ans, plusieurs manquements avaient été constatés sur le site, aujourd’hui contaminé et abandonné : entreposage de matières à l’extérieur de l’aire autorisée, réception de matériaux non autorisés, comme des résidus fins, absence de système de traitement des eaux, écoulement de lixiviat et d’eau noirâtre dans l’environnement.
« Laisser vos querelles de côté »
Le ministre Ian Lafrenière n’est pas le seul à avoir réagi à l’intensification des tensions entre les chefs de Kanesatake. Dans un courriel envoyé à ces derniers, le maire d’Oka, Pascal Quevillon, demande de pouvoir rencontrer l’ensemble des chefs de la communauté.
Dans la communication, que Le Devoir a pu consulter, le maire de la communauté voisine à Kanesatake indique être « conscient de la division » entre les élus : « Je vous demande de laisser vos querelles de côté pour se rencontrer, tout le monde ensemble, et trouver des solutions pour le bien et la santé de nos communautés respectives. »
Il est question des dossiers de G&R Recyclage, mais aussi de celui de « l’alimentation en eau potable pour une partie de la communauté », lit-on. Depuis plus de dix ans, des discussions ont lieu entre Oka et Kanesatake pour approvisionner en eau potable une partie de la communauté. Celles-ci sont actuellement sur la glace.
« Même s’il y a de la discorde entre certains membres de votre conseil, agissez en adultes responsables pour trouver un consensus afin d’avancer et de travailler ensemble pour votre communauté », écrit le maire.
Compte tenu des divisions au sein du conseil de bande, ce dernier refuse une rencontre qui ne rassemblerait que quelques chefs de Kanesatake : « Notez que la rencontre se fera avec l’ensemble des sept membres du conseil de bande seulement. »