Un couple de faucons pèlerins en période de reproduction à l’UdeM

Le miracle de la vie est sur le point de s’opérer de nouveau au sommet de la tour du pavillon Roger-Gaudry de l’Université de Montréal. Un couple de faucons pèlerins occupe en effet le nichoir qui s’y trouve et la période de reproduction vient de débuter. Une bonne nouvelle pour une espèce qui a déjà été complètement éradiquée du sud du Québec.

Les images captées par une caméra qui filme en direct le nichoir et ses environs ont permis d’observer ces jours-ci le couple, qui est le même que l’an dernier, en train de se reproduire. La femelle, nommée « Ève » et connue depuis 2018, devrait donc sous peu commencer à pondre des oeufs, explique Ève Bélisle, associée de recherche à l’École polytechnique de Montréal.

« La ponte du premier oeuf devrait avoir lieu d’ici deux semaines, mais pas avant une semaine, selon ce qu’on observe actuellement. Normalement, quand la ponte est imminente, la femelle commencera à passer la nuit au nichoir », souligne celle qui a découvert par hasard, en 2007, la présence de faucons pèlerins au sommet de la tour. Elle a donc convaincu l’Université de Montréal d’installer un nichoir (une simple boîte de bois avec du gravier) qui est maintenant utilisé depuis 2009.

En avril 2023, la femelle avait pondu quatre oeufs. On pouvait donc l’observer 24 heures sur 24 en pleine couvaison, tandis que le mâle s’affairait principalement à lui apporter de la nourriture, dont des pigeons. Ce dernier, nommé « Miro », couvait néanmoins quelques heures par jour.

Oisillons à venir ?

Le même scénario devrait se reproduire sous peu, mais Mme Bélisle espère que le résultat sera plus positif que l’an dernier. Les deux oisillons nés au sommet de la tour qui surplombe Montréal sont alors décédés, malgré les soins de leurs parents.

S’il est difficile pour le moment de prédire le succès reproducteur du couple pour ce printemps, au fil des ans, une trentaine de fauconneaux sont nés au sommet de la tour, qui a jusqu’ici accueilli deux femelles reproductrices.

Quant aux jeunes nés sur le terrain de l’Université de Montréal, on ne peut pas toujours savoir ce qu’ils sont devenus par la suite, même s’ils sont tous munis d’une bague pour les identifier. Certains ont niché dans le secteur de l’échangeur Turcot et un des jeunes faucons a été retrouvé blessé dans l’État de New York, puis relâché par la suite.

Chose certaine, chaque printemps, comme on peut le constater ces jours-ci, la période de reproduction de ces faucons suscite de l’intérêt. La page Facebook qui leur est consacrée compte plus de 13 000 abonnés et sur YouTube, on compte plusieurs visionnements pour certains moments forts, comme les repas des faucons.

Espèce éradiquée

Le fait de pouvoir observer des faucons pèlerins à l’Université de Mont­réal, ou encore dans d’autres sites urbains comme les ponts Honoré-Mercier ou Jacques-Cartier, aurait été impensable il y a à peine quelques années. Il faut savoir qu’au début des années 1970, l’espèce avait complètement disparu du sud du Québec.

Dans le passé, le faucon pèlerin a en effet été décimé, principalement en raison de l’utilisation massive de DDT, un pesticide très toxique qui a provoqué des problèmes chroniques de reproduction chez ces oiseaux. Et même si le DDT a été interdit au Canada dès 1972, la situation du faucon pèlerin est demeurée critique pendant plusieurs années, notamment en raison de la persistance du pesticide dans l’environnement.

Les premiers inventaires réalisés au Québec, dans la vallée du Saint-Laurent, indiquaient par exemple que l’espèce était pour ainsi dire rayée de la carte, avant qu’elle ne commence à gagner quelques rares couples nicheurs dans les années 1990.

Retour en force

Les effectifs de ces rapaces ont fini par augmenter, notamment en raison de leur capacité d’adaptation en milieu urbain. « Les oiseaux ont fait preuve de résilience et d’adaptabilité, notamment par une expansion rapide dans les villes où ils profitent des sites de nidification urbains et des proies », notait ainsi le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) dans une évaluation publiée en 2017 et qui classait l’espèce comme étant « non en péril ».

Dans un rapport produit à la demande du gouvernement du Québec et publié en 2022, on souligne qu’« après avoir connu une bonne augmentation de ses effectifs et un ralentissement plus récemment, le faucon pèlerin serait en bonne voie de rétablissement ».

On ajoute que cette espèce suscite un grand intérêt scientifique, ornithologique et photographique, notamment en raison de ses aptitudes de chasseur : en piqué, le faucon peut atteindre une vitesse de plus de 300 km/h. « De plus, étant donné sa position au sommet du réseau trophique, il est un bon indicateur de la qualité de l’habitat. »

Même si sa situation s’est grandement améliorée au Canada, l’espèce est toujours aux prises avec certaines menaces, dont les collisions avec les lignes à haute tension, les voitures ou les vitres d’édifices, le dérangement par l’escalade (le faucon niche souvent à flanc de falaise) ou les randonneurs, ainsi que les éoliennes.

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