Justice League : Warworld – critique qui veut la guerre

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WESTWORLD

Si la continuité de l’univers cinématographique de DC (ex-DCEU et futur-DCU) est aussi trouble qu’indéterminée, celle de son univers animé n’est pas mieux. Après avoir lancé son Tomorrowverse avec Superman : Man of Tomorrow, la branche animation de Warner s’est contentée d’enchaîner les films sans donner de direction claire, alternant entre productions originales médiocres et mauvaises adaptations de comics cultes simplement pour introduire les héros qui s’y trouvent.

Justice League : Warworld vient enfin apporter un peu de clarté et de liant dans ce nouvel univers étendu en réunissant Superman, Batman et Wonder Woman dans une aventure à travers le temps et l’espace qui se distingue d’emblée des précédentes adaptations. Le film a à peine commencé que Wonder Woman est en train de fracasser la tête d’un type contre le bar d’un saloon et se met à descendre les bandits du coin d’une balle en pleine tête.

 

Justice League: Warworld : photoLe Lasso de Vérité n’a jamais aussi bien porté son nom

 

L’Amazone, réinventée comme une flingueuse sans états d’âme, se met à dos Jonah Hex et ses hommes en prenant la défense des habitants et se retrouve finalement à mener une rébellion dans la petite ville du Far West. S’en suivent plus de fusillades (dont une avec un mini-gun, ce qui peut à la fois être un clin d’oeil et un doigt d’honneur au film Jonah Hex), mais aussi des scènes plus étonnantes et frappantes, comme le meurtre brutal d’un couple de fermiers sous les yeux de Diana.

Avec autant d’application que de second degré, le film reprend tous les clichés du genre, du cow-boy vertueux tout de blanc vêtu à l’attaque de train, mais pas que. Entre deux scènes d’action, le film s’amuse aussi à glisser tout un tas de références qui vont d’Indiana Jones à l’anecdote de la montre de Pulp Fiction. Le réalisateur Jeff Wamester réussit à trouver quelques idées de mise en scène intéressantes pour rendre cet univers de western encore plus cool, comme avec ce plan de dos d’un bandit qui se transforme en une giclée de sang révélant Diana sur son cheval, fusil à l’épaule.

 

Justice League: Warworld : photoJonah Hex est mieux fait que Double-Face dans Un Long Halloween, c’est déjà ça

 

WARCRAFT

Justice League : Warworld poursuit ensuite cette intéressante déconstruction des héros de la Trinité de DC dans un autre univers impliquant un personnage peu connu ou oublié : le monde de Skartaris, dirigé par Warlord. Dans ce monde d’heroic fantasy, un Batman qui ressemble à Conan le Barbare se retrouve capturé par le seigneur de guerre de DC, qui mène une lutte sanglante contre le sorcier Deimos. Enchaîné et dépouillé de son masque, le seul élément permettant de l’identifier, le héros se présente lui-même comme un mercenaire et propose à Warlord de le conduire à la salle du trône de Deimos en échange d’une partie de son trésor.

Le périple des deux hommes permet de varier les décors, du désert à la forêt tropicale en passant par un labyrinthe avec son Minotaure, et le film joue encore plus la carte de l’action et de la violence décomplexée, avec des têtes coupées en gros plans, des entrailles de dinosaures qui se déversent et plusieurs combats contre des créatures monstrueuses. Un sauvetage in extremis et certains passages cultivent l’idée que Bruce Wayne reste un héros malgré tout, mais une fois dans la salle du trône, le personnage se montre effectivement comme un barbare cupide et impitoyable, révélant une facette inattendue du personnage.

 

Justice League: Warworld : photoBatbare

 

Quand Bruce Wayne croise une Wonder Woman habillée comme Red Sonja à la fin de sa quête, le scénario prend une autre tournure : la structure anthologique se retrouve directement intégrée au récit, les héros découvrant qu’ils sont prisonniers de ces univers alternatifs étranges, tandis que le film se poursuit dans un troisième univers où Clark Kent est un agent du FBI menant une enquête dans un dîner à propos du crash d’un OVNI (qui a l’air d’être celui de Roswell). Le noir et blanc remplace la couleur et l’inspiration se tourne cette fois du côté du polar et des films de science-fiction des années 50 comme L’invasion des profanateurs de sépultures, avec King Faraday dans le rôle du partenaire du Kryptonien.

À mesure que Clark Kent et les autres héros comprennent que cette réalité n’est pas la leur, le film installe un climat tendu et paranoïaque plutôt efficace, qui évoque autant la xénophobie d’aujourd’hui que la peur anticommuniste d’antan. Le rythme est plus posé que dans les deux précédents segments, avec moins d’action et d’hémoglobine, mais le mystère au centre du récit et les efforts du film pour l’entretenir donnent envie de savoir où il veut aller avec cette histoire d’univers alternatifs et de visions d’un autre monde.

 

Justice League: Warworld : photoEnchanté, Clark Kent, FBI

 

DARK WORLD

Malheureusement, tout s’écroule une fois arrivé dans le quatrième et dernier segment. Wonder Woman, Batman et Superman se réveillent de leurs hallucinations et découvrent qu’ils sont retenus par un tyran sur immense vaisseau spatial appelé Warworld. Idée reprise directement d’un épisode de La Ligue des Justiciers baptisé L’Aire de Combat (Warworld en VO), sauf que le film ne fait aucun effort pour l’intégrer de façon cohérente dans son récit. Et ce qui était une arène de combat intergalactique dans la série d’animation se transforme alors en une énième arme de destruction “alimentée par la peur et la haine que pouvaient ressentir les héros” quand ils étaient coincés dans ces univers alternatifs.

Le film a beau faire preuve d’encore plus de générosité en faisant apparaître d’autres personnages mal-aimés de l’univers de DC ou en multipliant les scènes d’action jusqu’à l’épuisement dans son décor de vaisseau alien, l’explication autour de Warworld ou de la présence de Batman, Wonder Woman et Superman n’a tout simplement aucun sens.

 

Justice League: Warworld : photoAlors, vous n’allez pas le croire, mais…

 

Malgré un style graphique bien défini désormais, l’animation reste trop rigide pour offrir un délire visuellement marquant, ou un pur plaisir de fan, et alors que Justice League : Warworld devait enfin rassembler Batman, Superman et Wonder Woman, leurs segments individuels sont finalement plus ambitieux et passionnants que cette décevante réunion.

Mais de toute façon, le film s’en contrefout, puisque les dernières minutes dévoilent que toute cette histoire de Warworld et d’univers alternatifs ne sert en fait qu’à introduire l’idée qu’il existe plusieurs Batman, Wonder Woman et Superman à travers le multivers avant d’annoncer la crise au coeur du prochain film sur le calendrier de Warner Bros. Animation : l’adaptation du cultissime Crisis on Infinite Earths. Tout ça pour ça.

Justice League : Warworld est disponible depuis le 23 août 2023 en DVD, Blu-Ray et VOD 

 

Justice League: Warworld : Affiche officielle

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