Le Festival du monde arabe de Montréal, « solide » malgré les bouleversements du monde

En dépit du fait que la guerre entre Israël et le Hamas ébranle « à la fois le monde arabe et l’Occident », le directeur artistique adjoint du Festival du monde arabe de Montréal, Matias Ollivier, est confiant en la réussite de la 24e édition de l’événement qui s’ouvre samedi.

« On sent que ce [conflit] est un sujet qui traverse beaucoup les gens. Il faudra cependant vraiment attendre la tenue du festival pour constater l’état d’esprit réel du public », affirme M. Ollivier. Ce rendez-vous culturel, lors duquel se tiendra un salon de la culture, des spectacles et des projections de films, aura lieu dans différentes salles montréalaises et battra son plein jusqu’au 11 novembre.

S’il dit ne pas être insensible du tout à la guerre déclenchée le 7 octobre dernier, Matias Ollivier se fie à sa « solide » équipe pour assurer le bon déroulement de l’événement. D’un ton posé, il rappelle qu’au fil des années, des gens de tous les horizons ont exprimé des craintes ou de la colère avant le début du festival. Celui-ci s’est cependant toujours bien déroulé, d’après M. Ollivier, même en 2001, alors que l’édition s’était tenue peu après les attentats du 11 septembre aux États-Unis.

Le directeur artistique adjoint soutient que son festival est d’autant plus nécessaire en temps de crise, car il promeut des cultures arabes qui sont « multiples, foisonnantes et liées aux quatre coins du monde ». « Alors qu’il y a des replis identitaires qui sont en train de s’opérer, c’est l’occasion pour le festival d’être à nouveau un tampon qui peut diluer toutes ces mauvaises passions, sans avoir d’avis sur la situation politique. »

La scène, en étant le « lieu de toutes les libertés », permet d’ailleurs d’exposer les affinités entre les cultures, selon M. Ollivier. Le spectacle La Perse t’appartient, qui se tiendra le 1er novembre à la Cinquième Salle de la Place des Arts, permettra d’explorer la relation entre les musiques perse et arabe. « Les Perses ne sont pas Arabes, mais il y a un lien musical qui est fascinant à écouter. »

Pour clore le festival, le concert Roots of Flamenco, présenté au théâtre Maisonneuve, révélera les liens entre des traditions venues d’Irak et d’Andalousie, avec le joueur d’oud irako-hongrois Omar Bashir et le guitariste espagnol Carlos Piñana. Le musicien et conteur algérien Sidi Bémol se joindra notamment à eux.

Débats sur le thème « Appartiens-moi »

En plus de vibrer au rythme des sons variés, le public sera invité à échanger des idées lors du Salon de la culture, qui se tiendra notamment à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

Matias Ollivier explique que les sujets des débats — qui seront d’ailleurs ouverts à tous — ont été choisis en fonction du thème du festival, « Appartiens-moi. Fragments d’une identité vagabonde ». « “Appartiens-moi” est une formule mystérieuse, qui sonne provocatrice et qui a quelque chose de charnel. Avec le sous-titre, “Fragments d’une identité vagabonde”, c’est vraiment l’occasion d’explorer le rapport entre les différentes cultures et l’altérité. »

L’une des discussions portera sur le fait que certains usagers des réseaux sociaux ou des applications de rencontre s’inventent des origines en changeant leur prénom ou leur apparence. « Des influenceurs et des personnalités publiques vont par exemple se faire passer pour des Arabes. C’est l’occasion pour nous d’interroger ce mimétisme et ce jeu des identités », explique Matias Ollivier. Ce dialogue se tiendra le 4 novembre, au cabaret culturel Kawalees, dans le quartier Mile End.

Discussions de femmes sans filtre

 

La cinéaste canado-égyptienne Nisreen Baker espère que le festival attirera des Québécois de toutes les origines, afin de permettre au grand public de mieux saisir les différents points de vue qui existent dans le monde arabe. Son documentaire Les femmes arabes disent ÇA ? sera présenté gratuitement le 1er novembre à l’UQAM et sera suivi d’une discussion.

En entrevue avec Le Devoir, Nisreen Baker qualifie son long métrage « d’audacieux et révélateur », car il montre les conversations sans filtre d’un groupe de huit amies. Ces dernières vivent au Canada et sont d’origine kurde iranienne, marocaine, égyptienne, tunisienne, libanaise, soudanaise ou syrienne. « Il y a cette idée dans la société canadienne que les femmes arabes sont réservées et timides. Dans un sens, ça peut être vrai, mais quand nous nous réunissons entre nous, nous pouvons parler d’absolument tout. »

Mme Baker est impatiente de rencontrer les spectateurs du festival afin d’entamer avec eux un dialogue honnête et ouvert. « Les Canadiens doivent apprendre à se connaître réellement entre eux », ajoute-t-elle, sur un ton animé.

Festival du monde arabe

À la Place des Arts et dans divers autres lieux à Montréal, jusqu’au 11 novembre

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