Frappés de plein fouet par la hausse du coût de la vie, les Québécois considèrent l’inflation persistante comme l’événement médiatique de l’année. Fait rare, la crise du logement et l’augmentation de l’itinérance, qui suscitent traditionnellement peu d’intérêt, se taillent une place parmi les préoccupations du public en cette deuxième année d’explosion du prix des biens et services.
L’inflation et la hausse du coût de la vie figurent encore loin devant tous les autres événements ayant touché les Québécois durant l’année 2023 — comme en 2022 —, indique un sondage Léger mené pour l’émission Dans les médias. Quelque 50 % des répondants citent l’inflation comme le fait marquant des 12 derniers mois. Le coup de sonde a été réalisé auprès de 1002 répondants entre le 24 et le 26 novembre.
La guerre en Ukraine est loin d’être oubliée, un an et demi après son déclenchement par le président russe, Vladimir Poutine : 22 % des répondants indiquent que c’est l’événement qui les a le plus touchés. Le conflit armé entre Israël et le Hamas (et ses répercussions au Canada) a aussi retenu l’attention de 17 % des répondants.
La crise du logement et les feux de forêt dans le nord du Québec figurent ex aequo au troisième rang, avec 19 % de répondants les ayant identifiés comme le fait saillant de 2023. Quant à l’explosion du nombre de personnes itinérantes, 10 % du public juge qu’il s’agit de l’événement de l’année.
Legault et Trudeau à la baisse
« Je suis persuadé qu’il y a un lien entre la hausse du coût de la vie et la baisse de popularité des premiers ministres Legault et Trudeau », dit Philippe Léger, analyste à l’émission Dans les médias.
Au Québec, le Parti québécois devance désormais la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault par six points de pourcentage dans les intentions de vote, tandis que le premier ministre Justin Trudeau traîne de l’arrière partout au Canada contre son vis-à-vis conservateur, Pierre Poilievre.
Le sondage démontre que les répondants de tous les groupes d’âge, de tous les revenus et de toutes les régions se sentent affectés par la crise de l’inflation, souligne Philippe Léger.
Cette crainte généralisée face à la hausse du coût de la vie explique non seulement la perte de confiance envers les gouvernements — même s’ils sont plus ou moins responsables de la flambée des prix —, mais aussi l’intérêt marqué pour la crise du logement et la forte augmentation de l’itinérance. Les médias québécois, dont Le Devoir, ont abondamment couvert cette triple crise : des centaines de locataires se sont retrouvés à la rue après avoir été évincés.
Peu de politique
Philippe Léger note aussi qu’un enjeu environnemental retient l’attention du public : les gens ont été touchés par les feux de forêt ayant dévasté de vastes étendues du Nord québécois et entraîné l’évacuation de milliers de résidents. « C’est l’enjeu de l’année qui incarne les changements climatiques », dit l’analyste.
Il remarque que les consommateurs de nouvelles ont été touchés par des enjeux de fond — la guerre, le coût de la vie, l’environnement — et non par des sujets perçus comme anecdotiques, comme la controverse entourant la sortie du livre de Catherine Dorion, le film Barbie ou l’accident du sous-marin d’OceanGate près des ruines du Titanic.
De son côté, le feuilleton entourant le troisième lien entre Québec et Lévis n’a attiré l’attention que de 6 % des répondants, mais dans la région de la Capitale-Nationale, c’est le deuxième événement de l’année, derrière l’inflation, note Philippe Léger. Cela explique peut-être le mea culpa de François Legault après la défaite de la CAQ à l’élection partielle dans la circonscription de Jean-Talon, au début d’octobre, remportée par le péquiste Pascal Paradis.
Il s’agit aussi d’un des rares événements relevant de la politique fédérale ou provinciale ayant retenu l’attention du public, en plus des négociations entre le gouvernement et les employés de l’État, et l’ovation d’un ancien nazi à la Chambre des communes lors de la visite du président ukrainien.