Lévis dévoile les contours du parc industriel à naître sur les terres de Rabaska

Lévis avance désormais à visière relevée dans le dossier des terres de Rabaska. Dans un mémoire déposé en prévision du prochain bugdet, la Ville esquisse la future zone industrielle qu’elle espère voir naître sur cet ancien territoire agricole de 271,7 hectares que plusieurs rêvent de voir retourner en zone verte.

Le document déposé par Lévis demande l’aide financière du gouvernement pour faire l’« acquisition de terrains à des fins de développement industriel » dans l’est de son territoire. La superficie convoitée « dans une première phase » : entre 20 et 30 millions de pieds carrés, soit deux à trois fois la grandeur des plaines d’Abraham. 

Le mémoire demande aussi de prévoir des « compensations financières pour la destruction de milieux humides et hydriques ». Les terres de Rabaska totalisent 271,7 hectares : du nombre, 60 appartiennent à des milieux humides, dont 18 hectares de tourbières.

La Ville de Lévis réclame aussi le soutien financier du gouvernement pour prolonger l’aqueduc, l’égout et l’éclairage public jusqu’aux sites convoités. Dans son mémoire, elle évoque également la construction de bassins de rétention sur le site et l’aménagement de voies de circulation, d’espaces verts, et de pistes cyclables.

Près d’« un éventuel tunnel Québec-Lévis »

Le document déposé par la Ville lance un vibrant plaidoyer en faveur de la conversion définitive de ces terres en zone industrielle. Lévis vante notamment la proximité du territoire convoité avec la ligne ferroviaire du CN, le pont Pierre-Laporte et les autoroutes 20 et 73 « vers la Beauce et les États-Unis. » 

Les « terrains à potentiel industriel dans le secteur est de Lévis » ont aussi l’avantage de se situer « dans le secteur où un éventuel tunnel Québec-Lévis pourrait être réalisé », ajoute le mémoire, ce qui en augmente encore la valeur aux yeux de Lévis.

Les terres de Rabaska, riveraines du Saint-Laurent, ont aussi l’avantage de compter sur des eaux profondes de plus de 15 mètres à certains endroits. Le mémoire souligne encore la présence de lignes haute tension non loin capable d’alimenter des « clients ayant des besoins énergétiques importants » – comme des fabricants de batteries électriques, donne en exemple le document.

« La Ville de Lévis demande au gouvernement de conclure l’entente initiée pour l’acquisition des terrains appartenant à Rabaska, poursuit le mémoire, et de maintenir son financement admissible à la Ville pour les investissements préalables à la viabilisation de ce site. »

Lévis explique la nécessité de développer un nouveau parc industriel dans l’est de son territoire par l’inclusion du chantier maritime Davie dans la Stratégie nationale de construction navale.

« Les activités du chantier Davie Canada généreront un volume très important de sous-traitance à l’échelle locale, argumente le mémoire, amenant de nouveaux fournisseurs à s’implanter à Lévis, principalement à l’est. »

Enjeux environnementaux

Plusieurs, toutefois, réclament le retour de ce territoire dans le giron agricole. L’Union des producteurs agricoles exige que la totalité des terres retourne en zone verte. Idem pour le collectif citoyen Sauvetage du patrimoine agricole à Lévis et Beaumont qui veut éviter qu’un éventuel parc industriel détruise des centaines d’hectares de forêt et de terres agricoles de qualité.

Lévis, selon les données compilées par la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ), a perdu 980 hectares de terres agricoles entre 1988 et 2022 – une performance qui la classe bonne dernière en la matière parmi les principales villes du Québec.

Elle jouit néanmoins d’un territoire agricole qui totalise, selon le rapport de gestion 2023 de la CPTAQ, plus de 30 000 hectares. Il s’agit d’une superficie plus vaste que dans toutes les grandes villes de la province, à l’exception de Saguenay.

La présence de la gentiane de Victorin sur le site, une fleur unique au Québec et menacée de disparition, pourrait compromettre le développement d’activités portuaires sur les terres de Rabaska riveraines du fleuve.

« C’est une plante un peu emblématique, explique le botaniste Luc Brouillet, professeur honoraire de l’Université de Montréal et professeur émérite à l’Institut de recherche en biologie végétale. Surtout qu’elle porte le nom de Marie Victorin, nous pouvons comprendre l’émotivité associée à ça. »

Les terres de Rabaska, exclues de la zone verte en 2007 pour faire place à un port méthanier qui n’a jamais vu le jour, n’ont jamais regagné leur protection d’origine et continuent d’attiser la convoitise d’autorités qui aspirent au développement industriel des terrains. Le Port de Québec, la Ville de Lévis et le gouvernement caquiste ont tous manifesté le désir de les acquérir des mains de la Société Rabaska au fil de la dernière année.

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