pourquoi le Sénat a voté contre ?

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Le congé menstruel écarté : pourquoi le Sénat a voté contre ?

Les sénateurs ont rejeté ce jeudi 15 février 2024 la proposition de loi socialiste prévoyant la mise en place d’un arrêt spécifique pour les personnes menstruées ayant des règles douloureuses.

Le Sénat a fait un choix “regrettable” selon les parlementaires socialistes. La chambre haute du Parlement a rejeté leur proposition de loi permettant la mise en place d’un congé menstruel pour les personnes souffrant de règles douloureuses, ou dysménorrhée, ce jeudi 15 février. Le texte porté par la sénatrice Hélène Conway-Mouret et “visant à améliorer et garantir la santé et le bien-être des femmes au travail” a été écarté par 206 voix, dont celles des sénateurs de droite et des alliés centristes, contre 117. 

Par ce rejet de la mise en place d’un congé menstruel, “nous avons perdu l’occasion non pas d’être en avance, mais d’accompagner l’évolution de la société”, a regretté la sénatrice socialiste Laurence Rossignol. Sa collègue Hélène Conway-Mouret qui souhaitait “soutenir et encadrer un mouvement enclenché avec courage dans les secteurs public et privé” s’est aussi montrée très déçue par le vote du Sénat qui avait l’opportunité de prouver qu’il est “attentif tant aux attentes de nos concitoyennes qu’aux besoins des collectivités et des entreprises.”

Si la gauche était favorable à la proposition de loi, les sénateurs du centre et de la droite ont émis plusieurs réserves. La sénatrice apparentée au groupe Les Républicains, Béatrice Gosselin, a dit craindre “des effets secondaires non désirés” au congé menstruel, notamment une atteinte à “l’intimité de la personne” ou le coût de la mesure pour la Sécurité sociale. Frédéric Valletoux, le ministre délégué chargé de la Santé et issu du parti Horizons, s’est lui-même opposé à la mesure disant craindre un “risque de discrimination à l’embauche” pour les femmes usant de ce congé. Il a toutefois assuré vouloir “continuer à briser les tabous”.

Que prévoyait la proposition de loi ?

La proposition de loi socialiste pour la mise en place d’un congé menstruel définissait la cadre légal de la mesure et s’inspirait  de plusieurs initiatives prises à petite échelle, ainsi qu’à l’étranger. Concrètement, le texte prévoyait que les personnes menstruées puissent poser jusqu’à deux jours d’arrêt par mois, à condition de fournir un certificat médical confirmant qu’elles ont des règles douloureuses, pour cause d’endométriose par exemple. Il permettait aux médecins de fournir des certificats valables un an.  Cette mesure visait à éviter à ces femmes de devoir poser des congés maladie en cas d’incapacité à travailler pendant leurs règles, ce qui engendre pour elles une perte de revenus en raison des jours de carence.

Plusieurs collectivités adoptent déjà un congé menstruel

Le congé menstruel a déjà été testé à l’échelle de collectivités, à l’image de la mairie de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), mais aussi de plusieurs entreprises françaises. La ville de Grenoble a annoncé sa mise en place dans l’année, tandis que la maire de Paris avait adressé en avril dernier une lettre à Elisabeth Borne pour la solliciter sur le sujet. Une loi prévoyant cet arrêt de travail spécifique a été adoptée en Espagne en 2023. Au Japon, il existe depuis 1947.

“Depuis toujours, les femmes ont été forcées d’invisibiliser le fait qu’elles ont leurs règles, alors que celles-ci sont douloureuses pour une femme sur deux, souvent incapacitantes jusqu’à les empêcher de travailler de façon optimale, voire à créer de véritables obstacles dans leur carrière”, a déploré Hélène Conway-Mouret en ouverture du débat, ce jeudi. Pour la socialiste, si le texte est adopté, “le Sénat démontrera une nouvelle fois qu’il est attentif tant aux attentes de nos concitoyennes qu’aux besoins des collectivités et des entreprises.”

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