les 10 Meilleurs Films qu’il faut avoir vus, sinon c’est impardonnable

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Boulevard du Crépuscule, Certains l’aiment chaudLa Garçonnière… Retour sur l’éminente carrière de Billy Wilder, figure incontournable du cinéma hollywoodien et de la comédie.

Si Billy Wilder a dû quitter l’Empire austro-hongrois dans les années 20 à cause de l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir (et oui), son arrivée aux États-Unis lui a permis de devenir l’un des plus grands réalisateurs de l’Histoire du cinéma. Avec 25 films en solo à son compteur en près de cinquante de carrière, le cinéaste n’a pas forcément été l’un des plus prolifiques de l’industrie, mais rares sont ceux à avoir livré autant de chefs d’oeuvres dans des genres différents.

Billy Wilder a réalisé autant de classiques du film noir, thriller, drame ou aventure, tout en étant le maître incontesté de la comédie (romantique s’il en est). Et si Sept ans de réflexion porté par l’inoubliable Marilyn Monroe n’est pas dans ce dossier, tout comme l’élégant Ariane ou l’oscarisé Le Poison, c’est justement parce que compiler une liste de (seulement) dix films a été une tâche herculéenne (alors pas taper s’il n’y a pas votre chouchou).

Retour sur 10 films parfaits de Billy Wilder pour (re)découvrir son cinéma.

 

Sept ans de réflexion : Photo Tom Ewell, Marilyn MonroeQuand tu voulais sortir le champagne pour fêter… ah mais en fait non

 

assurance sur la mort

Sortie : 1944 – Durée : 1h43

 

Assurance sur la mort : photoFilature discrète

 

Agent d’assurances, Walter Neff tombe amoureux de Phyllis Dietrichson. Ensemble, ils décident de tuer son mari et de partager son assurance-vie.

Pourquoi c’est un classique absolu du film noir : Parmi les associations majeures du septième art, il y a celle entre Billy Wilder et Raymond Chandler (l’auteur du Grand sommeil). Bien que les deux hommes aient hésité à travailler ensemble, ils ont finalement redéfini et transcendé le film noir. La voix off de Fred McMurray, si typique du genre, n’a jamais été aussi brillante. Au-delà de sa valeur littéraire, le fait de la transformer en confession du personnage permet d’accompagner chaque étape du récit dans une ironie dramatique ravageuse.

 

Assurance sur la mort : photoVraiment des as du cache-cache

 

En évitant la linéarité habituelle du cinéma policier, le film redistribue les cartes et explore en priorité les raisons de l’acte criminel, et par extension les dilemmes et tourments de ses personnages à la noirceur d’encre. Dès lors, Assurance sur la mort sublime cette donnée par son travail de la lumière, maintes fois commentée pour les clairs-obscurs de ses cadres, ses jeux d’ombres et ses contrastes qui traduisent un monde fait d’oppositions et de zones de gris qui s’entremêlent.

Difficile d’ailleurs de ne pas se prendre d’affection pour ce couple meurtrier, qui en vient à questionner notre propre moralité. C’est dire à quel point le point de vue de Billy Wilder sur cette histoire est absolument virtuose, et servi par des acteurs au sommet de leur art, en particulier Barbara Stanwyck dans son rôle de femme fatale incontournable

 

boulevard du crépuscule

Sortie : 1950 – Durée : 1h50

Boulevard du Crépuscule : Gloria Swanson« Vous savez, sans moi, la Paramount n’existerait pas »

 

Un scénariste fauché se retrouve chez une ancienne star du muet qui vit recluse depuis le passage du cinéma au parlant. Il lui propose alors d’écrire un scénario qui lui permettrait de réapparaître sur le grand écran, ce qu’elle accepte, même si cette collaboration vire au drame. 

Pourquoi c’est un Billy Wilder indémodable : En ayant commencé sa carrière de cinéaste peu de temps après l’effondrement du muet au profit du parlant, Billy Wilder a traité ce bouleversement du 7e art hollywoodien dans l’indétrônable Boulevard du Crépuscule (en référence au célèbre Sunset Boulevard de Los Angeles).

Le scénario, qui a marqué la dernière collaboration entre le réalisateur et le scénariste Charles Brackett, s’articule autour de l’extravagante Norma Desmond, une ancienne vedette qui refuse d’admettre que le cinéma muet s’est fait supplanter. Celle-ci, qui n’a jamais voulu prendre la mesure de sa propre obsolescence, reste donc persuadée qu’elle pourra faire son grand retour en jouant la mythique Salomé.

 

Boulevard du Crépuscule : Gloria Swanson dans la scène finale du filmUne scène parfaite qui valait un Oscar du meilleur scénario

 

Pour mieux refléter ce paysage hollywoodien métamorphosé, le film use de références méta, en particulier au niveau du casting. Norma est ainsi jouée par Gloria Swanson, une grande star du muet en déclin qui partageait quelques points communs avec son personnage (même si elle a eu droit à son chant du cygne, elle). Certaines personnalités jouent également leur propre rôle, à l’image de Cecil B. DeMille, Buster Keaton ou Jay Livingston, quand le réalisateur Erich von Stroheim incarne un majordome et ancien réalisateur tiraillé entre son affection pour Norma et l’évidence que sa carrière est depuis longtemps terminée.

L’impressionnant manoir de Norma reflète quant à lui toute l’opulence et la décadence d’une époque euphorique, Wilder ayant lui-même vécu entouré de ces résidences fastidieuses à Los Angeles. Le lieu prend cependant des airs inquiétants de sarcophage dans lequel s’empilent vainement d’innombrables trésors et antiquités. Ce cynisme, qui irrigue déjà la plupart des dialogues, atteint son point d’orgue lors de la séquence finale, aussi grandiloquente et pathétique que le personnage et l’époque dans laquelle elle est restée figée. Boulevard du Crépuscule est donc un grand moment de cinéma sur l’histoire du cinéma.  

 

le gouffre aux chimères

Sortie : 1951 – Durée : 1h51

 

Le gouffre aux chimères : photo, Kirk DouglasThe Descent

 

Un journaliste sans scrupule profite d’un accident dans une grotte, où un homme est piégé, pour créer un événement et servir ses ambitions de succès, à n’importe quel prix.

Pourquoi c’est un Billy Wilder incontournable : S’il fallait trouver un moyen de vendre Le Gouffre aux chimères à quelqu’un qui fuit devant un film en noir et blanc avec le père de Michael Douglas, on pourrait le comparer à Night Call avec Jake Gyllenhaal. Parce que c’est une parfaite histoire de journaliste pourri jusqu’à l’os, qui profite du malheur de l’autre pour servir ses rêves de gloire.

Lancé après le succès de Boulevard du crépuscule, avec un Billy Wilder producteur pour la première fois, Le Gouffre aux chimères a été froidement accueilli à sa sortie ; à tel point que le studio a modifié le titre en The Big Carnival contre l’avis du réalisateur. Mais le film est naturellement devenu un classique au fil des années, car c’est certainement un des Billy Wilder les plus modernes et incisifs, qui pourrait sans aucun problème être refait en ajoutant TikTok dans l’équation.

 

Le gouffre aux chimères : photo, Kirk DouglasÉcran Large recalé à une projo

 

Les outils ont changé, mais l’histoire reste la même : celle d’un tragique cirque du vide où tout le monde joue son triste rôle (ceux qui mettent en scène pour s’enrichir et ceux qui regardent pour se divertir), et d’une humanité vite corrompue et consumée, notamment par l’alcool, comme dans Le Poison, un autre film de Billy Wilder.

Écrit par Walter Newman, Lesser Samuels et Billy Wilder, Le Gouffre aux chimères est donc un mémorable sommet de noirceur. Et le film marquait aussi la rencontre de cinéma entre le réalisateur et le grand Kirk Douglas, parfait en journaliste bouffé par sa cupidité, qui s’enterre et s’étouffe lui aussi, à sa manière, en parallèle de sa victime superstar.

 

stalag 17

Sortie : 1953 – Durée : 2h00

 

Stalag 17 : Photo Don Taylor, William HoldenLe charisme de William Holden, encore

 

Durant la Seconde Guerre mondiale, des soldats américains emprisonnés au Stalag 17, un camp de prisonniers de guerre allemand, voient toutes leurs tentatives d’évasion échouer. Très vite, ils soupçonnent l’un d’entre eux d’être un traître au service des Allemands.

Pourquoi c’est un film tristement délaissé : Lorsqu’il est sorti au cinéma en 1953, Stalag 17 a été un véritable carton avec plus de 10 millions de dollars remportés en salles (pour un budget de 1,6 million). Salué par la critique et le public et même Hollywood avec trois nominations aux Oscars dont la victoire de William Holden dans la catégorie meilleur acteur (lui qui avait étrangement perdu pour Boulevard du crépuscule), Stalag 17 était encore un pari gagné pour Billy Wilder. Pourtant, soixante-dix ans plus tard, le film est rarement cité parmi les meilleurs de sa filmographie.

 

Stalag 17 : photoHeil Wilder

 

Une perte de réputation difficilement compréhensible tant Stalag 17 prouve la grandeur de la palette du cinéaste et notamment sa capacité à jongler en permanence entre les genres avec une facilité déconcertante. S’il démarre en quasi silence et sous tension avec l’évasion de l’introduction et bascule, d’une certaine manière, dans l’horreur avec le drame à venir, Stalag 17 va toujours venir contrecarrer les attentes.

Le sujet du film est évidemment dramatique et franchement complexe, mais Billy Wilder parvient à en tirer une vraie comédie, lorgnant la satire avec son humour noir caractéristique. Loin d’être des modèles de vie, les soldats sont de simples humains tuant l’ennui comme ils peuvent dans l’espoir de survivre à leur sort. Et si le cynique Sefton de William Holden a tout du traître parfait, il sera finalement bien plus que ce que le scénario le laissait supposer. Avec son jeu paranoïaque, sa moquerie incessante du IIIe Reich et ses petits moments de tension (l’intro, le piège final…), Stalag 17 est donc un petit classique plein d’esprit (et probablement l’un des plus simples d’accès de la carrière de Wilder).

 

sabrina

Sortie : 1954 – Durée : 1h53

 

Sabrina : photo, Humphrey Bogart, Audrey Hepburn, William HoldenLa révélation Audrey Hepburn

 

Sabrina est secrètement amoureuse de David, fils de la riche famille pour laquelle son père travaille. Lorsqu’elle part faire des études à Paris et qu’elle revient, plus chic que jamais, le tombeur David la remarque enfin. Mais c’est aussi le cas de son frère aîné, moins beau, mais aussi plus sincère.

Pourquoi c’est le meilleur de la comédie romantique : l’année d’avant la sortie de Sabrina, une certaine Audrey Hepburn éblouissait tout le monde aux côtés de Gregory Peck dans Vacances Romaines de William Wyler. Avec le film de Billy Wilder pour en remettre une couche, le mythe est né. L’icône Audrey Hepburn, brune délicate en pantalon cigarette et yeux de biche, est définie pour de bon. C’est d’ailleurs à l’occasion de ce tournage que naît la passion de l’actrice pour les tenues du couturier Givenchy, qui l’habillera ensuite pour le reste de sa vie.

 

Sabrina : photoLe “Parasite” de Billy Wilder

 

Face à la nouvelle star, le légendaire Bogart se fait plus touchant que jamais dans le rôle d’un homme qui n’a pas grand-chose pour plaire, mais qui va se faire agneau pour y remédier. Loin d’être une simple bluette à l’eau de rose (bien que c’est sans doute depuis ce film que Paris ne peut plus jamais être représentée à l’écran sans que quelqu’un chante La Vie en Rose), Sabrina revisite Cendrillon en y injectant un discours sur la société de classes et beaucoup d’ironie.

Humphrey Bogart et William Holden sortent de leur rôle habituel pour rivaliser d’humour sur des dialogues enlevés et des situations absurdes. Véritable mètre étalon de la comédie romantique à la fois belle, drôle, intelligente et follement charmante, Sabrina a défini tout un style, et bien plus que celui d’Audrey Hepburn. Une romance de l’âge d’or hollywoodien qui n’a pas fini de faire rêver, tant qu’on aimera les contes de fées (même sans fées).

  

témoin à charge

Sortie : 1957 – Durée : 1h51

 

Témoin à charge : Photo Tyrone PowerQuand tu comprends que Billy Wilder a fait trois films en 1957

 

Tout juste sorti de l’hôpital, l’éminent avocat Sir Wilfrid Robarts accepte de défendre un cas désespéré : Leonard Vole, un homme accusé du meurtre d’une riche veuve.

Pourquoi c’est un Agatha Christie à ne pas manquer : En 1957, il y a déjà eu près d’une vingtaine d’adaptations des oeuvres d’Agatha Christie sur les écrans (petit ou grand), mais aucune n’a vraiment eu grâce à ses yeux. Tout le contraire de Témoin à charge qu’elle décrira comme “la première adaptation correcte d’une de ses oeuvres”, soit une critique pas anodine de la part de l’exigeante romancière.

D’autant plus que Billy Wilder s’est largement libéré de certaines contraintes de la pièce éponyme. Le moyen d’introduire une petite dose humoristique (sa marque de fabrique) à travers le personnage inventé de Miss Plimsoll (Elsa Lanchester), infirmière attachante du vieil avocat grincheux interprété par l’imposant Charles Laughton.

 

Témoin à charge : Photo Marlene Dietrich, Charles LaughtonUne confrontation remarquable

 

Bien qu’accompagné par un formidable casting, dont l’excellente Marlene Dietrich dans le rôle de la femme de l’accusé, l’acteur légendaire est sans aucun doute l’immense atout du film. Il incarne cet avocat avec un charisme dévastateur, à la gouaille indétrônable et au monocle de vérité savamment pensé. En résulte un petit thriller judiciaire voguant habilement sur le terrain du film noir avec son récit terriblement ambigu et ses personnages profondément immoraux.

Billy Wilder livre d’ailleurs peut-être ici l’un de ses films les plus hitchcockiens avec ce drame plein de suspense et de rebondissements. Et même si les multiples twists tombent un peu dans la surenchère (d’où cette voix off finale appelant les spectateurs à ne rien révéler à ceux qui ne l’ont pas vu, comme un des rares anti-spoilers avant l’ère moderne), c’est un petit mystère qui vaut le détour.

 

certains l’aiment chaud

Sortie : 1959 – Durée : 2h

 

Certains l'aiment chaud : photo, Marilyn MonroeCertains l’aiment tout court

 

Pour échapper à la mafia, deux musiciens se travestissent en femmes pour se cacher au sein d’un orchestre féminin à bord d’un train. Mais dans ledit orchestre se trouve l’irrésistible Sugar, qu’ils vont essayer de séduire malgré leur déguisement.

Pourquoi c’est l’une des plus grandes légendes du cinéma : Certains l’aiment chaud fait partie de ces films que tout le monde aime et auxquels il est difficile de trouver le moindre défaut. Parmi les plus grands succès de Billy Wilder, il est devenu un classique aussi bien par sa facture irréprochable que pour son casting.

Avec un trio de géants à sa tête, le film ne peut que séduire : Marilyn Monroe, Tony Curtis et Jack Lemmon accordent magnifiquement leurs violons pour raconter cette histoire aussi drôle qu’improbable. Certaines répliques sont d’ailleurs devenues cultes, à l’instar de l’expression “Personne n’est parfait !” popularisée par le dialogue final du film.

 

Certains l'aiment chaud : photo, Jack LemmonAttention : film woke

 

Si le tournage est souvent cité comme étant l’un des plus compliqués de l’histoire du cinéma, notamment en raison des problèmes posés par une Marilyn Monroe déphasée (qui décèdera malheureusement trois ans plus tard), l’objet final n’en est pas moins lumineux, et la star y explore tout son potentiel comique. Dans un rôle légèrement plus en retrait, Jack Lemmon (qui fait davantage office de clown là où Tony Curtis est le séducteur) est brillant. C’est même la colonne vertébrale du film, qui se repose sur la solidité de son interprétation et la profonde gentillesse de son personnage.

Là où certains aspects du film ont malgré tout vieilli, notamment à travers le regard assez sexiste facilement induit par ce type de scénario (mention spéciale à la scène où les deux héros matent longuement l’arrière-train de Monroe sur le quai de la gare en la comparant à un bol de gelée monté sur ressorts), le rythme, le ton et certains propos du film restent aujourd’hui incroyablement modernes et réussis. Un bijou de cinéma qui mérite amplement sa réputation de chef-d’œuvre.

 

la garçonnière

Sortie : 1960 – Durée : 2h05

 

La Garçonnière : photo, Jack Lemmon, Shirley MacLaine“Shut up and deal”

 

Employé dans une grande compagnie d’assurance, le trop gentil C.C. Baxter prête son appartement à ses supérieurs qui y emmènent leurs maîtresses. Mais la situation devient légèrement compliquée lorsque son patron y emmène Fran, dont il est lui-même amoureux…

Pourquoi c’est l’un des plus beaux Billy Wilder : Qui aurait pu croire qu’un point de départ digne du théâtre de boulevard pouvait ouvrir sur une histoire d’amour aussi belle et raffinée ? C’est tout le génie de Billy Wilder, qui a profité du succès de Certains l’aiment chaud pour immédiatement se lancer dans un nouveau projet avec son co-scénariste I. A. L. Diamond et Jack Lemmon.

Derrière ses airs de canaille avec un sujet politiquement incorrect dans les années 60, La Garçonnière est un petit trésor doux-amer, qui mélange les rires et les larmes avec une aisance intemporelle. Enchaîner une tentative de suicide et un égouttage de spaghettis avec une raquette de tennis, sans jamais se moquer ni trahir ses personnages, ça relève presque du miracle. Et c’est avec une sensibilité hors pair que le film opère cet irrésistible petit cirque.

 

La Garçonnière : photo, Jack Lemmon, Shirley MacLaineUne scène absolument parfaite

 

L’autre trésor de La Garçonnière, c’est évidemment le duo Jack Lemmon-Shirley MacLaine. Ils se retrouveront juste après dans Irma la douce, mais ici, ils jouent à un très haut niveau, beaucoup plus beau, car beaucoup plus humain. Servis par une écriture impeccable (la déchirante scène avec le miroir de poche), ils sont absolument magnifiques du début à la fin, jouant toute la détresse, la tristesse et la solitude de leurs personnages avec une fausse légèreté qui brise le coeur.

Considéré à l’unanimité comme l’un des meilleurs Billy Wilder, La Garçonnière a été un succès à sa sortie, et a remporté l’Oscar du meilleur film, meilleur scénario et meilleur réalisateur.

 

irma la douce

Sortie : 1963 – Durée : 2h27

 

Irma la douce : photo, Jack Lemmon, Shirley MacLaineMinuit à Paris

 

Un ancien policier très candide tombe sous le charme d’une prostituée, et met au point un plan absurde pour qu’elle n’ait plus besoin de travailler : se faire passer pour un riche lord anglais, qui deviendra son unique client.

Pourquoi c’est un Billy Wilder incontournable : Irma la douce est une comédie qui a commencé dans la tragédie. Le film était à l’origine prévu pour Marilyn Monroe, qui aurait retrouvé Billy Wilder et Jack Lemmon après Certains l’aiment chaud, mais la mort de l’actrice en 1962 a tout changé. Le cinéaste a alors proposé le rôle à Shirley MacLaine, après La Garçonnière.

D’une histoire légèrement glauque (une prostituée tombe amoureuse de l’ex-flic qui a tabassé son mac, fond en larmes en disant qu’elle veut continuer à se prostituer et gagner de l’argent pour lui prouver son amour, et il finit par coucher avec elle en se faisant passer pour un autre), Billy Wilder tire une pure comédie vaudevillesque. Les gens se battent, picolent, dansent, hurlent et se courent après dans un joyeux festival qui semble sans fin (près de 2h30 tout de même).

 

Irma la douce : photo, Shirley MacLaineThis Barbie can do anyone

 

Toujours accompagné par son fidèle co-scénariste I. A. L. Diamond, Billy Wilder n’a va pas de main morte. Irma ne lâche jamais son chien “habillé” comme elle, en plus d’être alcoolique. Jack Lemmon devient aussi méconnaissable en Lord X que Clark Kent sans son slip de Superman, et “ressuscité” comme par magie dans la Seine. Dans Irma la douce, on s’évade d’une prison comme dans un cartoon et la plaisanterie dure jusqu’à la toute dernière scène, où un véritable Lord X apparaît sorti de nulle part.

Au milieu de ce petit chaos, Billy Wilder fait des merveilles. La scène où les policiers viennent fouiller l’appartement d’Irma mérite à elle seule le détour, rappelant l’impeccable sens du timing comique du cinéaste et de Jack Lemmon. Et bien sûr, il y a Shirley MacLaine, absolument parfaite.

 

fedora

Sortie : 1978 – Durée : 1h54

 

Fedora : photoLa dernière croisade

 

Barry « Dutch » Detweiler, un scénariste et producteur sur le déclin, apprend que la mégastar Fedora, connue pour sa beauté légendaire, est décédée. Pourtant, il était venu la voir quelques semaines auparavant pour lui proposer le rôle qui aurait redéfini sa carrière.

Pourquoi c’est le diamant noir de Billy Wilder : Longtemps resté invisible, Fedora a surtout connu une réception tiède lors de sa sortie en 1978. Néanmoins, il s’agit peut-être du dernier grand film de Billy Wilder, qui condense de la plus belle des manières son rapport au faux-semblant.

Sans doute que le long-métrage a souffert du comparatif inévitable avec Boulevard du crépuscule, bien que son regard sur le star-system est à la fois complémentaire et passionnant. Il est certes question du mythe de la jeunesse éternelle des acteurs (et surtout des actrices), mais le cinéaste construit à merveille le point de vue de ce scénariste nostalgique, embourbé dans sa vision fantasmée de l’âge d’or hollywoodien.

 

Fedora : photoSissi la famille

 

Wilder critique à sa façon la liaison entre le Nouvel Hollywood et un passé dont il ne parvient jamais vraiment à se séparer. Attraction et répulsion, voilà la dynamique majeure au coeur de la mise en scène de Fedora, dont la gestion somptueuse des couleurs s’accompagne d’une lumière diffuse de songe. Fedora n’existe pas. Seule son image subsiste dans cet univers cotonneux et fantomatique, où l’on remet solennellement des Oscars. Un chef-d’oeuvre d’une grande beauté.

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